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Le Monde du Sud// Elsie news

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Haïti, les Caraïbes, l'Amérique Latine et le reste du monde. Histoire, politique, agriculture, arts et lettres.


HAITI/CORRUPTION. Haïti : crime de lèse-développement - Par Christophe Wargny

Publié par siel sur 25 Novembre 2019, 22:50pm

Catégories : #AYITI ROSE RAKET, #AYITI EXTREME DROITE, #AYITI ECONOMIE, #PEUPLE sans mémoire..., #DUVALIER

HAITI/CORRUPTION. Haïti : crime de lèse-développement - Par Christophe Wargny

Du Chili au Liban, en passant par l’Irak, l’Algérie et d’autres, se lève un vent anticorruption. Comparé aux autres, Haïti cumule plusieurs handicaps : pas de matières premières, pas d’argent dans les caisses de l’Etat, pas de système fiscal efficace… Mais la même corruption.

Le traître, le film de Marco Bellocchio, occupe les écrans de nos cinémas. Un repenti mène les juges au cœur de la mafia sicilienne, puis à un procès si énorme qu’il faut bâtir une salle spéciale. Même protégés à grands frais, des témoins, des magistrats ou des journalistes laissent leur peau dans les procès anticorruption. L’autoroute explose au passage de la voiture blindée du juge Falcone.

En Haïti, les juges ne sont protégés de rien. Par peur ou par habitude, ils s’en prennent rarement aux puissants. Les voleurs de mangues peuvent croupir des mois en prison faute d’instruction, les dealers n’y traînent pas longtemps, l’instruction des gros poissons s’enraie dès les premiers interrogatoires. Les deux rapports 2019 de la Cour des comptes n’en sont que plus inattendus et méritoires. Ils rapportent. Utilement. Mais ne jugent pas.

Faisons simple : Le Venezuela et des Etats du Caricom (la communauté caribéenne) ont créé le fond Petrocaribe. Une part de la facture pétrolière se paie cash, le reste à crédit, à bas coût et long terme. De quoi soutenir des projets de développement en Haïti. Ces facilités ressemblent à des ristournes consenties par le fournisseur. Depuis 2008, somme investie dans les projets : 3 milliards d’euros sur dix ans. Pas rien ! L’équivalent d’un budget annuel d’Haïti. Investis ? Non, en fait détournés par une partie de la classe politique, à coups de projets bidon et de marchés opaques. Ont émargé des hauts fonctionnaires, des ministres, à commencer par les Premiers, et deux présidents de la République, le précédent et l’actuel, Jovenel Moïse. Il s’agit du hold-up le plus rémunérateur de l’histoire d’Haïti, qui n’en manque pas. Jean-Claude Duvalier, entre 1971 et 1986, apparaît comme un gagne-petit : il n’avait escroqué qu’un petit milliard aux dépens des projets de développement des bailleurs internationaux.

La protestation dure depuis des mois. Le régime y répond d’abord par la répression, alternant les gaz et les balles réelles : des dizaines de morts chez les manifestants, des menaces contre ceux qui enquêtent. Les gros bâtons et les gros bras laissent parfois place à des propositions de dialogue. Quelques bons samaritains parlent de «conseil national de transition» ou des «états généraux de la nation». Pour négocier sur quoi ? La population exige le départ et la traduction en justice d’une mafia qui s’accroche aux postes clés.

Jamais la situation n’avait atteint pareil paroxysme d’incertitude et de dénuement depuis le coup d’Etat de 1991, ou l’après-séisme de 2010. Le pays est à l’arrêt. Les communications souffrent des barrages routiers et les écoles sont fermées. Habitué depuis des lustres au mode survie, Haïti approche du collapsus. Le PIB stagne quand la population augmente. La gourde s’effondre. Les importations renchérissent les prix, l’agriculture locale, premier employeur, peine. L’approvisionnement en pétrole est irrégulier, l’électricité un luxe. Les deux tiers de la population vivent avec 2 euros quotidiens quand 1% détient 40% des richesses. Chacun rêve d’émigration.

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