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Le Monde du Sud// Elsie news

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Haïti, les Caraïbes, l'Amérique Latine et le reste du monde. Histoire, politique, agriculture, arts et lettres.


Haïti, " Qui fait l'ange, fait la bête"

Publié par Elsie HAAS sur 24 Juin 2009, 09:49am

Catégories : #REFLEXIONS perso

"J'ai toujours été effrayé par le peu de cas qu'on fait du travail, de l'effort chez nous."

Cette pensée, ô combien profonde, a été produite par un des VIP du "Collectif Non", grand écrivain, journaliste, auteur également de scénario (ou i pour les puristes) dont un autre VIP du "Collectif Non" patron des réalisateurs haïtiens vient de faire un film à partir d'un  de ses écrits.

Personnellement, je suis sidérée de lire des propos d'une  si effrayante inconsistance.
Il suffit de se balader à Port-au-Prince et de voir les efforts inouïs que font les "petites gens" , comme ils sont appelés par les "grandes gens",  pour  faire un constat contraire.

Peut-être que cet important personnage de l'intelligentsia se réfère à son monde de copains.

Mais moi , ce que je vois , dans mes  voyages en Haïti, c'est carrément l'inverse
C'est au contraire, l'effort quotidien des "pitit soyet" des enfants de pauvres, de la classe moyenne, pour s'en sortir.
Il n'y a qu'à voir l'effort inouï qu'ils font pour envoyer leurs enfants à l'école.
Les uniformes propres, les barettes aux cheveux, les marches à pied pendant des kilomètres.
Je vois un effort quotidien de ces femmes qui travaillent dans les industries de transformations, au nom bien trouvé de "sweatshops", boutiques à suer", qui elles aussi font des kilomètres, changent de transport- et quel transport!- deux à trois fois , pour se rendre à leur lieu de travail et ramener une pitance qui servira tout juste à la survie dans l'honneur.
Parce que le problème des femmes haïtiennes est d'éviter de tomber dans la prostitution, dans la mendicité pour survivre.
Ce qui demande un effort énorme, compte tenu de l'absence totale/ capitale, de structures de soutien aux défavorisés du pays.

Comment  en sommes-nous arrivés au point que les zentellectuels  reconnus par la France, qu'ils parlent d'aïl dominicain plus beau que l'aïl haïtien, ou qu'ils montrent de belles photos de la Guadeloupe à leurs élèves, qu'ils produisent des Moloch Tropical et des Attila contre GNB, ou qu'ils boycottent les célébrations du bicentenaire de  l'indépendance de leur pays, soit-disant pour ne pas être complices d'un dictateur- eux qui sont restés silencieux et ont vécu dans le pays tranquillement pendant les 2 Duvalier- fassent figure de penseurs ?

Est-ce qu'ils croient, vraiment,  que le paysan haïtien qui travaille avec des outils qui datent du 19ème siècle ne fait pas des efforts ?
Que la "madan Sarah ", la revendeuse, qui se coltine avec ses ballots dans les tap-tap, des camions qui ont plus à voir avec le transport de bestiaux, ne fait pas des efforts.
Que le type qui s'installe  sur le trottoir  à Port-au-Prince dès 5H du matin, pour vendre les chaises qu'il a lui-même fabriquées- on ne sait même pas comment -puisque la télévision nationale, les cinéastes du bord de mer, ne s'intéressent pas à documenter les stratégies courageuses de survie mises au point par les Haïtiens qui ne peuvent compter que sur, précisément, leur travail et l'effort quotidien pour dépasser leurs conditions et apporter à leurs enfants une possibilité de s'en sortir, ne fait pas des efforts ?

Ou bien, s'agit-il d'une posture qui vise à se démarquer en dénigrant "l'autre "et en  le rendant responsable, lui qui n'a pas les outils intellectuels et matériels, de la situation du pays ?

Au contraire, ce qu'il faut noter , c'est véritablement cette absence de travail et d'effort des " travailleurs intellectuels" qui, dans leur grande majorité, se contentent d'exprimer leur mépris pour le peuple tout en nourrissant leur oeuvres de la culture populaire de manière plus "voyeuse" que dynamique.  Un fonds de commerce destiné  principalement aux maisons d'éditions étrangères. Une démarche à l'inverse des Roumain ou Alexis,  Maire Chauvet, Laraque, et bien d'autres,  qui ont appuyé et soutenu le travail et les efforts des Haïtiens.

Le plus ennuyeux dans cette histoire, c'est que beaucoup des membres du "Collectif Non" sont des enseignants, des artistes, etc, donc des communicants, des passeurs de savoir.  Ils pèsent lourd dans la formation des jeunes têtes pour lesquels ils sont des référents, des modèles.

Et ça, c'est tout le désastre de l'éducation haïtienne, dont on parle peu, mettant la responsabilité sur l'Etat. Cette éducation qui est managée dans des écoles et universités privées par des "héritiers des Duvalier"  ayant eux-mêmes fait leurs classes dans les écoles primaires et secondaires de la papadocratie. Et qui, de ce fait, sont capables d'asséner sans recul et toute honte bue ,ce genre de phrases non seulement fausses mais qui vont dans le sens de la propagande qui veut faire croire aux Haïtiens qu'ils sont nuls, que leur histoire ne vaut rien et que la" Perle des Antilles" était un paradis pour leurs ancêtres esclaves.

Les Haïtiens ne sont pas nuls. Les Haïtiens, comme les Indiens d'Amérique Latine ou ceux du Canada, comme tout peuple nié,  exploité et méprisé, peuvent tomber dans le désespoir qui conduit à toutes sortes de turpitudes.

Tant que l'éducation et la transmission des connaissances seront monopolisés par ce groupe de farfelus, limite schizophrènes, les Haïtiens continueront à faire des efforts démesurés, quasi inhumains pour garder la tête hors de la boue dans laquelle ces VIP du "Collectif Non", ont plaisir  par des petites phrases assassines à les enfouir.

Sans compter que, c'est faire comme si le travail des Haïtiens et leurs efforts n'étaient pas empêchés par  une clique qui préfère  les voir dans les bateyes, en tant que  boatpeople, ou dans les universités étrangères, plutôt que de déranger le statu quo, dont ces mêmes éminents personnages bénéficient peu ou prou.

Il me semble qu'il est  de notre devoir  de lutter contre ce dénigrement systématique et gratuit du peuple haïtien.

Bref " Qui fait l'ange, fait la bête". C'est Pascal  (le philosophe français) qui l'a dit.

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