Mme LINDA THOMAS-GREENFIELD (États-Unis) a relevé que la situation en Haïti montre à quel point le soutien continu des Nations Unies demeure vital. Elle a rappelé qu’en
décembre, les États-Unis ont convoqué une réunion de haut niveau avec Haïti et ses partenaires internationaux dans le but de prévoir des mesures concrètes et rapides pour renforcer la PNH. De même, le Canada a accueilli une réunion ministérielle sur Haïti en janvier, à laquelle ont participé 19 États et plusieurs organisations multilatérales. Dans une déclaration publiée à l’issue de la rencontre, le Canada a souligné « l’importance de renforcer le soutien international et la coordination de l’aide internationale » en faveur d’Haïti. Juste cette semaine, a rappelé la représentante, le Gouvernement haïtien a tenu une conférence sur la reconstruction. Toutes ces conférences et rencontres témoignent de la préoccupation et de l’engagement de la communauté internationale envers Haïti, a-t-elle argué, ajoutant que « Haïti n’est pas isolé » et que le renouvellement du mandat du BINUH
réaffirmera l’engagement commun à soutenir le peuple haïtien dans ses efforts pour faire face aux crises politiques et sécuritaires en cours.
En revanche, Mme Thomas-Greenfield a reconnu qu’il y a de quoi s’inquiéter. En effet, l’activité des gangs a augmenté rapidement, les Haïtiens étant victimes de meurtres, d’enlèvements, de violences sexuelles et de déplacements forcés. Les responsables de ces actes horribles doivent être tenus responsables, a-t-elle exigé. De même, elle a souligné que la PNH a besoin d’un soutien financier ainsi que d’équipement, de formation et d’un leadership cohérent, ce qui permettra sa professionnalisation continue et renforcera sa capacité à lutter contre les gangs et à améliorer la sécurité des citoyens. Mais comme le note le rapport du Secrétaire général, la Police ne peut à elle seule résoudre les problèmes de sécurité d’Haïti, a-t-elle reconnu en appelant à fournir un soutien non seulement aux forces de l’ordre, mais aussi au système judiciaire et aux initiatives de réduction de la violence communautaire. Car il faut aider Haïti à créer un système de justice pénale fonctionnel, a plaidé la représentante. Enfin, elle a dit attendre avec impatience la publication de l’évaluation du Secrétaire général sur le mandat du BINUH en avril.
« La situation en Haïti pourrait difficilement être plus préoccupante », a constaté M. JUAN RAMÓN DE LA FUENTE RAMÌREZ (Mexique) en se déclarant particulièrement inquiet de la crise de la sécurité publique, marquée par les violences des gangs qui contrôlent la majeure partie de Port-au-Prince et des cas de violences sexuelles contre les femmes, les filles et les jeunes hommes. Dans ce contexte, il a jugé alarmant le déplacement de milliers de personnes, tout comme la fragilité voire l’inefficacité du système judiciaire. Ces multiples défis exigent de traiter les causes profondes de l’insécurité et de la violence, mais aussi de s’attaquer au trafic d’armes et à la corruption, a plaidé le représentant, indiquant que son pays contribue à ces efforts en formant la Police nationale d’Haïti (PNH) à la lutte contre la criminalité organisée et au renforcement de la confiance parmi la population.
Le délégué a ensuite estimé que la formation d’un conseil électoral provisoire ne peut être reportée en vue de la tenue des élections présidentielle et législatives. « Il est temps que les différends politiques se règlent dans les urnes », a-t-il dit, avant d’évoquer la crise humanitaire, qui est aggravée, selon lui, par la dégradation de l’environnement, les effets des changements climatiques et leur incidence sur la sécurité alimentaire. À cet égard, il a annoncé que le Mexique prévoit de lancer en Haïti un programme d’assistance qui viendra en aide à plus de 5 000 personnes. Ce projet, a-t-il noté, s’ajoute au déploiement d’une brigade médicale l’an dernier, à l’envoi de 2 000 tonnes de vivres et de médicaments, et à la mise en place d’un programme de bourses pour les jeunes Haïtiens. Enfin, après avoir rappelé que le BINUH a été la première mission politique spéciale créée dans le cadre de la réforme de la paix et de la sécurité promue par le Secrétaire général, il a souhaité que l’évaluation des missions, préconisée par la résolution 2600 (2021), permette d’accroître l’efficacité de la présence onusienne en Haïti.
M. BING DAI (Chine) a souligné la gravité de la situation en Haïti et appelé les dirigeants du pays à assumer leurs responsabilités. Une structure politique stable est fondamentale, a dit le délégué, en demandant le lancement d’un dialogue politique inclusif. Il a aussi souhaité l’adoption d’un calendrier électoral réaliste. Il a dénoncé la violence des gangs et plaidé pour une police haïtienne plus professionnelle. Il a rappelé que 40% de la population du pays a besoin d’une aide humanitaire et exhorté la communauté internationale à augmenter celle-ci. Haïti doit surmonter les obstacles institutionnels qui entravent son développement économique, a dit le délégué de la Chine. Enfin, il s’est dit favorable à un réajustement du mandat du BINUH et a demandé qu’il renforce sa coopération avec le PNUD et la Commission de consolidation de la paix. Les pays de la région devraient aussi intensifier leurs efforts en appui à Haïti, a conclu le représentant.
M. BRIAN PATRICK FLYNN (Irlande) s’est inquiété de la détérioration de la situation sécuritaire en Haïti et de l’augmentation de la violence sexuelle et sexiste et de la persistance de l’impunité pour les violations et les abus des droits humains. Afin d’améliorer la situation en matière de sécurité, il a recommandé de procéder à une hiérarchisation des priorités et des ressources pour les services de police, insistant notamment sur le renforcement des capacités et de la confiance. Notant que l’augmentation de la violence a exacerbé la vulnérabilité, il a indiqué que sans aide d’urgence, le peuple haïtien continuera de faire face à des choix désespérés, pour ensuite saluer la conférence internationale qui s’est déroulée cette semaine à Port-au-Prince, où 600 millions de dollars ont été recueillis.
Sans aide, les Haïtiens tenteront un voyage périlleux à l’étranger plutôt que de rester chez eux, a poursuivi le délégué. Et lorsqu’ils font ce voyage, il est crucial que tous bénéficient de protections juridiques en vertu du droit international des réfugiés. Des voies sûres, légales et dignes pour ceux qui fuient la violence sont plus que jamais essentielles, a estimé le représentant. Ce dont les Haïtiens ont vraiment besoin, c’est d’une voie vers la stabilité politique, capable de créer les conditions propices à la reprise économique et au développement durable, a encore déclaré le représentant pour lequel le consensus est le seul moyen de sortir de l’impasse politique. Ce consensus doit reposer sur un engagement large, inclusif et participatif, y compris des représentants de la société civile. Et les solutions durables exigent une garantie de sûreté et de sécurité pour tous ceux qui s’engagent politiquement, et pour les femmes afin d’assurer leur participation significative, pleine et égale.
Mme TRINE SKARBOEVIK HEIMERBACK (Norvège) a indiqué que la gestion des crises qui ébranlent Haïti et le nécessaire développement durable du pays ne peuvent se faire sans rétablir la confiance dans le système politique et judiciaire fondé sur l’état de droit. Tous les acteurs politiques doivent donc s’engager dans un dialogue inclusif pour résoudre le problème politique actuel dès que possible, et il faut organiser de nouvelles élections légitimes. Pour cela, elle a appelé à un processus inclusif, y compris la participation pleine, égale et significative des femmes, afin de trouver une solution haïtienne à la situation politique. Pour la représentante, cette situation pourrait bénéficier d’un engagement international plus fort, y compris un BINUH plus fort.
La déléguée a plaidé pour que les violations et exactions liées à la violence armée à Port-au- Prince soient traitées de toute urgence. Le recours signalé à la violence sexuelle et au viol par des gangs criminels comme arme pour terroriser et affirmer leur contrôle est inacceptable, a-t-elle déclaré. Elle a regretté que cette violence contribue à déplacer les populations affectées, en particulier les femmes et enfants, notant que les personnes handicapées courent également des risques particuliers. Elle a appelé les autorités à faire davantage pour protéger leurs citoyens, veiller à ce que les travailleurs humanitaires aient un accès sans entrave et mettre rapidement en œuvre la stratégie nationale de réduction de la violence communautaire. Enfin, la représentante a dit attendre avec intérêt l’évaluation du mandat du BINUH, estimant que ce n’est pas le moment pour la communauté internationale de réduire son engagement en Haïti.
M. RAVINDRA RAGUTTAHALLI (Inde) a constaté que la situation politique et sécuritaire en Haïti est restée volatile et tendue depuis la dernière réunion du Conseil consacrée à ce pays. Malgré la polarisation actuelle, il s’est félicité des efforts déployés par les dirigeants haïtiens pour parvenir à un consensus sur l’avenir politique du pays. Il a également salué le fait que le Premier Ministre ait réitéré, le mois dernier, son engagement à dialoguer avec toutes les parties prenantes et confirmé que le prochain chef de l’État serait choisi par la voie démocratique. Le représentant s’est toutefois déclaré préoccupé par la persistance des violences liées aux gangs, principalement dans la capitale Port-au-Prince, appelant à un renforcement des capacités de la Police nationale d’Haïti. Il a d’autre part observé qu’en dépit des divers défis, les projets du Fonds pour la consolidation de la paix en faveur de la réduction de la violence communautaire et du programme de désarmement, démobilisation et réintégration (DDR) progresse positivement. Enfin, affirmant attendre avec intérêt l’évaluation indépendante du BINUH attendue en avril pour définir la marche à suivre en Haïti, il a rappelé que l’Inde a renforcé son aide à ce pays, notamment à la suite du passage de l’ouragan Mathew en octobre 2016 et durant la pandémie de COVID-19.
Mme NATHALIE BROADHURST ESTIVAL (France) a déclaré qu’Haïti traverse aujourd’hui une crise très grave, sur plusieurs fronts. « La classe politique est minée par les divisions, la plupart des institutions connaissent de profondes difficultés, les groupes criminels terrorisent la population et Haïti se relève à peine du tremblement de terre du mois d’aout 2021. » Il y a urgence, a déclaré la déléguée. Elle a affirmé que seul le dialogue peut sortir Haïti de la crise politique actuelle. Elle a salué à cet égard la constitution d’un gouvernement d’ouverture, en novembre dernier, sous l’égide du Premier Ministre Ariel Henry. Il faut mettre un terme à la violence des gangs, a poursuivi la déléguée. « La priorité est de consacrer davantage de moyens à la Police nationale d’Haïti, qui en retour doit se montrer irréprochable. » Elle a ensuite souligné l’importance de renouer avec un fonctionnement normal des institutions. « Il faut regarder les choses en face: aujourd’hui le système judiciaire haïtien est déliquescent. » Or, il est crucial pour Haïti de mener à bien l’enquête sur l’assassinat du Président Jovenel Moïse, a tranché la déléguée. Enfin, jugeant alarmante la situation humanitaire en Haïti, elle a déclaré qu’en 2022 la France contribuera à la réponse humanitaire en Haïti à hauteur de 6,5 millions d’euros.
M. FERIT HOXHA (Albanie)a déclaré que la lutte contre l’insécurité reste la priorité absolue en Haïti. Par conséquent, le rétablissement de l’autorité de l’État doit être le point de départ de la marche vers la normalité, a estimé le représentant. À cet égard, a-t-il dit, tous les efforts doivent être faits pour renforcer la Police nationale d’Haïti et l’assistance internationale est nécessaire pour faciliter les réformes judiciaires, lutter contre la corruption et mettre fin à l’impunité. Le pays ne sortira pas de ces crises sans une voie claire vers la démocratie, a souligné M. Hoxha, qui a pris note de la volonté du Premier Ministre Ariel Henry de dialoguer, y compris auprès des partisans de « l’accord du Montana ». À ses yeux, la solution réside dans un dialogue national inclusif, avec la participation de toutes les parties prenantes politiques, économiques et de la société civile. La communauté internationale peut et doit aider, mais le règlement de la crise est entre les mains des Haïtiens eux-mêmes, a prévenu le délégué.
M. Hoxha a appelé à accélérer les préparatifs des élections qui doivent êtres inclusives, pacifiques, libres, équitables, transparentes et crédibles et avec la participation pleine, égale et significative des femmes, et de la société civile. Après avoir salué les 600 millions de dollars promis à la conférence internationale des donateurs pour aider Haïti à se reconstruire, le représentant albanais a appelé les autorités haïtiennes à travailler avec le
BINUH pour engager les réformes urgentes dont le pays a besoin et améliorer la stabilité politique et la bonne gouvernance et de créer un Haïti plus sûr, démocratique, juste et plus prospère.
M. MARTIN KIMANI (Kenya), s’exprimant au nom des A3 (Gabon, Ghana et Kenya), a exhorté les dirigeants politiques d’Haïti, ses professionnels et les membres de la société civile à faire preuve de compromis en forgeant un modèle constitutionnel et en organisant des élections crédibles pour déboucher sur la création d’un gouvernement inclusif et compétent. L’Union africaine et les États africains doivent partager leurs connaissances et leurs bons offices avec le peuple d’Haïti en ce moment de besoin, a-t-il estimé, rappelant que l’Acte constitutif de l’Union africaine reconnaît la diaspora comme sixième région, et qu’Haïti en fait partie.
Poursuivant, le représentant a salué les efforts en cours du BINUH et d’autres partenaires pour renforcer la capacité de la Police nationale d’Haïti, notamment en ce qui concerne les opérations antigangs. Il a souligné la nécessité d’intégrer, dans les programmes d’assistance, des formations à la protection des femmes et des filles contre les violences et abus sexuelles et sexistes. Il a également encouragé les autorités haïtiennes à procéder à une réforme de fond du secteur judiciaire afin de lutter contre les détentions préventives prolongées, créer des bureaux d’aide juridique, accélérer des affaires judiciaires et établir des greffes fonctionnels. Ces mesures sont essentielles pour lutter contre l’impunité et veiller à ce que les responsables de crimes emblématiques, dont l’assassinat du Président Jovenel Moïse, soient traduits en justice, a souligné M. Kimani qui a jugé tout aussi essentiel que le lien entre la politique, les gangs et les flux financiers illicites soit brisé.
Sur le plan économique, le représentant des A3 a jugé urgent de s’attaquer aux causes profondes de la pauvreté et de la précarité afin de permettre une reconstruction durable en Haïti, déplorant que le pays continue de perdre la précieuse main-d’œuvre dont il a besoin pour sa reconstruction. Il a ensuite remercié les donateurs ayant pris part à la réunion du 16 février sur la reconstruction et le relèvement de la péninsule Sud d’Haïti suite au tremblement de terre dévastateur du 14 août et à la tempête tropicale Grace du 17 août dernier. Notant que la majorité des 14 milliards de dollars levés à cette occasion sont destinés à financer les réponses d’urgence, il a souligné qu’une aide supplémentaire est nécessaire pour appuyer la sécurité alimentaire, le développement des infrastructures, la réforme du secteur de la justice et de la sécurité, l’éducation, et la gestion des risques de catastrophe. Il a en outre souhaité que le mandat du BINUH soit revu afin qu’il puisse offrir un meilleur soutien au pays.
Mme AMEIRAH OBAID MOHAMED OBAID ALHEFEITI (Émirats arabes unis) a condamné les violences perpétrées par des gangs armés qui sapent les efforts de paix en Haïti, appelant au renforcement de l’état de droit pour rétablir la stabilité et remettre le pays sur la voie de la prospérité. Dans cet esprit, la représentante a jugé essentiel d’élargir la représentation et l’inclusion de tous les segments de la société haïtienne, en particulier des femmes, qu’il convient aussi de protéger contre la violence. Elle a d’autre part préconisé de renforcer le secteur de la sécurité pendant le processus de transition et de lutter contre la corruption. Elle a également estimé que la réduction de la violence communautaire nécessite des solutions durables, notamment par le biais du développement et des efforts humanitaires. À cet égard, la déléguée a souhaité que les programmes de relèvement, tels que les initiatives de développement communautaires, permettent d’améliorer les moyens de subsistance et d’offrir des opportunités aux Haïtiens. Elle a dit attendre avec intérêt le prochain rapport d’évaluation stratégique, tout en se disant convaincue qu’une stratégie cohérente dirigée par Haïti lui-même, avec l’appui de l’ONU, est la solution pour restaurer la paix et la stabilité dans le pays.
M. RONALDO COSTA FILHO (Brésil) a dit qu’Haïti est très proche du cœur des Brésiliens et rappelé que son pays a déployé des milliers de Casques bleus au sein de l’ancienne Mission des Nations Unies pour la stabilisation en Haïti (MINUSTAH). Qualifiant la situation en Haïti de critique, il a estimé que la présence de l’ONU doit être réévaluée, selon une approche intégrée, prenant en compte les dimensions sociale, politique et économique de la crise. « Haïti doit briser le cercle vicieux de la pauvreté, de la criminalité et de la violence politique.
» Il a aussi souhaité un renforcement sur le dossier de la coopération entre le Conseil de sécurité, le Conseil économique et social et la Commission de consolidation de la paix. Il a rappelé que cette dernière a été créée pour catalyser les efforts de consolidation de la paix et de promotion du développement. Le représentant du Brésil a jugé inévitable une discussion en profondeur du mandat du BINUH et dit attendre avec impatience les recommandations du Secrétaire général en avril. Enfin, il a souhaité que le principe fondamental de l’ONU, qui est de « ne laisser personne sur le côté », guide les efforts du Conseil en ce qui concerne la crise haïtienne.
Mme ALICE JACOBS (Royaume-Uni) a déclaré que les défis sécuritaires, sanitaires et
économiques auxquels Haïti est confronté ne peuvent être résolus que par un soutien unifié aux solutions dirigées par Haïti. À cet égard, l’appui au BINUH demeure essentiel, a-t-elle estimé, s’inquiétant en outre de la persistance de l’impasse politique et de ses répercussions sur le peuple haïtien. Elle a soutenu les efforts en cours pour parvenir à un consensus politique pour assurer la tenue d’élections libres, équitables et crédibles. Elle incombe en outre aux partenaires internationaux d’Haïti de soutenir une solution dirigée par Haïti.
Rappelant que l’assassinat du Président Moïse a été un acte odieux, elle a réitéré son appel pour que les auteurs de ce crime soient traduits en justice. Le Royaume-Uni est aussi
préoccupé par la détérioration de la situation en matière de sécurité et de droits humains, en particulier par l’augmentation des enlèvements, de la violence criminelle et les cas de traite des êtres humains, a-t-elle ajouté. Profondément préoccupé par la situation humanitaire dans le pays, la représentante a encouragé tous les acteurs à travailler de manière constructive avec les autorités haïtiennes pour trouver des solutions aux causes profondes de ces crises et pour soutenir le développement et le progrès du peuple haïtien.
M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a déclaré que la situation en Haïti est marquée par une crise profonde, s’inquiétant du vide du pouvoir à tous les niveaux, ainsi que la paralysie des systèmes judiciaire et de sécurité. Il a pris note des mesures adoptées par le Gouvernement pour avancer dans le bon sens, avec des résultats modestes. Le représentant a déploré que des armes à feu rentrent dans le pays par des ports que le Gouvernement ne contrôle visiblement pas. Il s’est également inquiété du manque de progrès dans l’enquête sur l’assassinat du Président Moise. Des informations laissent voir une implication étrangère dans cet acte, a-t-il affirmé, souhaitant que les coupables en rendent compte. Pour permettre au pays de sortir de la crise, il a appelé à lancer des réformes qui conduiraient à la tenue des élections afin d’éviter que le pays ne sombre dans un gouffre. De même, la BINUH doit favoriser le dialogue entre les parties prenantes haïtiennes, a—t-il préconisé.
M. ANTONIO RODRIGUE (Haïti) a commencé par exprimer sa gratitude pour l’élan de solidarité international qui a permis de mobiliser, mercredi dernier, 600 millions de dollars en promesses de don pour la reconstruction de la péninsule du Sud d’Haïti, frappée l’an dernier par un séisme dévastateur. Il a ensuite estimé qu’il importe aujourd’hui de remettre les institutions démocratiques de son pays sur les rails, compte tenu de leur dysfonctionnement actuel. Évoquant à ce sujet l’assassinat en juillet dernier du Président Jovenel Moïse, il a constaté que le système judiciaire national n’arrive pas à faire la lumière sur ce drame. De plus, a poursuivi le représentant, nous n’avons plus de Parlement capable de jouer le rôle dévolu au pouvoir législatif. Rétablir le plus rapidement possible le fonctionnement normal des institutions est donc impératif pour ramener durablement la paix et la stabilité dans le pays, a-t-il dit, assurant que le Gouvernement œuvre à la construction de consensus à cette fin. Dès son entrée en fonction, le Premier Ministre, M. Ariel Henry, a ainsi tenu à rencontrer tous les acteurs de la vie nationale afin de trouver un accord pour une « gouvernance apaisée et efficace » durant la période intérimaire, a précisé le délégué, non sans se réjouir que cette initiative ait permis de rallier des adversaires
politiques.
Il convient à présent de mettre en place les structures indispensables à la tenue d’une consultation populaire pour l’adoption d’une nouvelle Constitution et d’organiser des élections générales libres, honnêtes et démocratiques, a poursuivi le représentant, selon lequel, « si tout se passe bien », le pouvoir devrait être rendu à des élus choisis par le peuple haïtien « au début de l’année prochaine ». Il a toutefois averti que l’insécurité actuelle fait peser un risque important sur tout le processus. En effet, a-t-il déploré, les gangs armés font régner la terreur dans plusieurs régions du pays et dans divers quartiers de la capitale, ce qui implique de rétablir l’ordre et de restaurer l’autorité de l’État préalablement à l’organisation d’élections. Faisant état de succès de la PNH, notamment de la réouverture d’écoles dans des quartier contrôlés par des gangs et de terminaux pétroliers bloqués plusieurs semaines par des « bandits », il a reconnu que beaucoup reste à faire pour revenir à une situation normale et que « la répression seule ne suffit pas ».
Nous avons besoin d’un soutien renforcé pour les corps spécialisés de la Police nationale, a expliqué M. Rodrigue, précisant que ces derniers manquent cruellement d’armes, de munitions et d’équipements appropriés. Nos policiers ont aussi besoin de formation et d’encadrement adaptés pour leur permettre de faire face efficacement à la situation, a-t-il ajouté, avant de relever que l’instabilité chronique que connaît son pays non seulement perturbe la vie économique, mais empêche aussi les investissements et fait fuir les touristes, tout en maintenant le peuple dans la misère en en poussant les jeunes vers l’émigration illégale. Sans des investissements massifs, sans la création d’emplois durables et bien rémunérés, nos efforts seront vains, a estimé le délégué, formant l’espoir que la solidarité internationale avec Haïti, constatée mercredi dernier, se manifestera aussi pour le rétablissement de la sécurité.
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