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Le Monde du Sud// Elsie news

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Haïti, les Caraïbes, l'Amérique Latine et le reste du monde. Histoire, politique, agriculture, arts et lettres.


Les héritiers des Tontons macoutes en Haïti - Par Vincent Hugeux. publié le 04/11/1993

Publié par siel sur 23 Décembre 2022, 23:49pm

Catégories : #AYITI EXTREME DROITE, #AYITI ROSE RAKET, #AYITI ECONOMIE, #PEUPLE sans mémoire..., #DUVALIER

«L'exil ou le cercueil.» Très fier de sa formule, le jeune militant duvaliériste de Port-au-Prince, nostalgique d'une tyrannie dont il ignore tout, offre au président Aristide, renversé le 30 septembre 1991, cette seule alternative. D'ailleurs, la sépulture est prête.

Au seuil du bar La Normandie, un «houngan» - prêtre vaudou - le visage baigné de sueur, l'a tracée à la «poudre magique», sous l'effigie du «baron Samedi», maître des cimetières. «S'il revient, on le dévore!» tonne en créole un client, le regard fatigué par l'alcool.

Ici, au quartier général des «attachés», nervis zélés de la police, le rhum coule à flots. Comme pour noyer le compromis de Governors Island, signé le 3 juillet dernier par Jean-Bertrand Aristide et le général Raoul Cédras, artisan de son éviction et commandant en chef des forces armées d'Haïti. Le premier devait, aux termes de l'accord, retrouver, le 30 octobre, les fastes coloniaux du Palais national; il ronge toujours son frein dans le luxe glacé d'une résidence de Washington. Quant au second, il rechigne à faire valoir, ainsi qu'il était convenu, ses droits à la retraite, jugeant trop chiche l'amnistie concédée aux putschistes.

Les fêtards de La Normandie savent bien que les serments sont solubles dans le jus de canne. Lunettes noires, casque lourd et treillis de l'US Army, un caporal s'abandonne au tempo du tambour, tandis qu'un mastodonte surnommé «Rambo» parade sous l'objectif des photographes. Avec une nonchalance étudiée, des porte-flingues en civil promènent leur M 16 américain.

A la nuit tombée, massés sur des pick-up Toyota, attachés et «zenglendos», héritiers des Tontons macoutes de l'ère Duvalier, sillonneront les bas quartiers, lâchant leurs rafales, tantôt vers les étoiles, tantôt à hauteur d'homme.

On dénombre, pour les quatre mois écoulés, plus d'une centaine de meurtres. Le 11 septembre, un commando de tueurs traîne l'homme d'affaires pro-Aristide Antoine Izméry hors de l'église du Sacré-Coeur de Turgeau, puis l'abat d'une balle dans la tête.

Un mois plus tard, le ministre de la Justice, Guy Malary, son chauffeur et un garde du corps sont exécutés non loin de là. Assassinats conduits avec une rigueur toute militaire, sans pour autant que l'armée épargne aux familles ses «condoléances émues». Menacé, le procureur chargé du dossier disparaîtra dans la clandestinité.

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