Remercions M. Morse pour la clarté de son texte.
Richard Morse : Le peuple haïtien a besoin d'un lobbyist
Compte tenu de l’ambiance qui règne en Haïti, on peut considérer ce « cri » comme un acte de bravoure.
Pour les observateurs attentifs des événements qui se déroulent en Haïti depuis ce que j’appelle la « restauration macoute », ce texte même s’il soulève l’indignation, ne peut pas surprendre.
La répression systématique des forces populaires progressistes englobées sous les qualificatifs de « chimère », de « terroristes » et autres, dès le départ d’Aristide par les tenants du mouvement de l’extrême droite, dit GNB, (grenn-nanbounda) a été relatée, décrite, photographiée, filmée par un grand nombre de sources.
Le livre de Peter Hallward « Damming the Flood », http://www.monthlyreview.org/mrzine/hallward170408.html
raconte l’organisation de cette répression. Par exemple, les incursions des "ninjas" des beaux quartiers descendant masqués, la nuit, pour aller éliminer des militants, qui leur avaient été désignés auparavant par des informateurs, etc. Tout cela a été bel et bien fait.
Pour celui ou celle qui voulait savoir, qui voulait aller au-delà de la propagande des média dominants et déformants ce n’était pas difficile. Mais, comme dans le cas de la torture en Irak, il était plus tranquille pour les bonnes âmes de croire en la parole des « gens de bien » la journée, transformés en gansters masqués la nuit. Comme dans le cas des tortures en Irak, les responsables et complices de ces crimes contre des innocents seront connus dans les années futures.
Dès 2007, j’avais écrit un texte qui s’intitulait « Van an vire epi li devire » pour exprimer cette accointance du président Préval avec les forces et individus d’extrême droite. J’avais également attirer l’attention sur la situation d’Alexis qui, selon moi, serait sans doute éliminé pour avoir osé affirmer qu’il fallait développer la production nationale. Le lobby de l’importation qui comprend des billionnaires, n’allait pas laisser passer ça. Il a suffi d’organiser une émeute de la faim –et ceci ne s’est passé qu’en Haïti, alors que des émeutes de la faim, il y en a eu un peu partout à la même époque- pour trouver une raison au limogeage d’Alexis.
Mais dans ce texte de M. Morse, ce qui m’intrigue, c’est cette histoire de « gang des onze ». Que M. Morse se sente dans l’obligation d’utiliser une sorte d’image pour désigner un groupe de personnes, m'étonne.
Parce qu'il me semble que ce « gang des onze » ce sont bien après tout des « chrétiens vivants » avec un état civil en bonne et due forme, tout comme vous et moi.
L’utilisation de cette image « gang des onze » fait froid dans le dos. On se croirait revenu –presque- à l’époque de la « paix des cimetières ». Cette régression est d’une tristesse infinie. Surtout décourageante pour le peuple haïtien qui a tant lutté, qui a versé beaucoup de son sang depuis 1957, pour se retrouver en 2009 avec les mêmes inamovibles zombificateurs aux postes de commande. C’est pourquoi, un texte comme celui de M. Morse, le travail fait par différentes personnes pour mettre la lumière sur les faits, sont des actes de solidarité avec les masses dont la plupart des leaders ont été exterminés, vivent cachés ou en exil.
Les "gens de bonne famille", comme le note M. Morse, restent persuadés que ce peuple est ignare, imbécile et qu’il n’est pas capable de faire la différence entre l’exploitation et la dignité.
Dans les discussions que j’ai eu, à l’époque, avec des gens appartenant à la classe moyenne, tous fous de joie et enthousiasmés par le coup d’Etat de 2004, j’ai essayé en vain de faire valoir :
- que c’était la structure qui était en cause mais non pas l’homme. Changer d'homme et garder le système vous aurez exactement les mêmes résultats.
- qu’il paraissait impossible qu’un beau matin, l’élite du business de l'importation et des sweatshops, se soit réveillée avec le désir soudain de participer au développement du pays, genre "j'ai fait un rêve " .
-qu’il me semblait qu’il s’agissait plutôt de faire un coup pour évincer un empêcheur de tourner en rond, de rebattre les cartes entre les mêmes joueurs, en incluant quelques nouveaux associés de la classe politique : sénateurs, députés, maires, anciens fonctionnaires duvaliéristes, ex-éléments de gauche de la diaspora,etc.
Il s'agissait de la remise en place du système de la papadocratie (sans son héritier biologique, que malgré leurs efforts, ils n'ont pas pu rapporter au pays) avec ses barons de la classe politique associés aux hommes d’affaires. Faute de macoutes officiels chargés de la répression, la PNH -dans laquelle M. Latortue s’était empressé de d’intégrer des anciens militaires, anciens membres du Frahp- et la Minustah pourraient, quand nécéssaire et plus discrètement, jouer un rôle équivalent.
Ainsi fut fait.
Jusqu’à ce qu’on arrive à ce qu’aujourd’hui un ancien ministre de Duvalier, M. JR Estimé soit conseiller du président. Lequel M. Estimé faisait l’objet d’une plainte déposée par le gouvernement haïtien en 1997.
Haiti acts against corrupt Duvalier aides ( ça date de 1997)
Qui était président d’Haïti en 1997 déjà ?
Enfin, est-ce que 11 personnes peuvent tenir un pays sous sa domination ?
De la même manière que sous le système esclavagiste, il me semble.
Onze personnes représentent un système qui s'assure les moyens de sa domination. Chacun devrait aujourd’hui en plein XXI ème siècle savoir une chose aussi évidente. Un groupe de 11 personnes qui possède l’exclusivité de l’économie du pays entre ses mains, tient également les autres systèmes: policier, politique, juridique, administratifs. De facto, il domine le pays. D'autant plus, quand ce groupe compte dans ses alliés les bailleurs de fonds qui ouvrent ou ferment les cordes de la bourse, au gré de leurs intérêts communs.
Il ne faudrait donc pas se méprendre sur ce que dit M. Morse qui est loin d’être un idiot.
Quand Morse parle du « gang des onze » il parle d’une structure antidémocratique qui court-cicuite toutes les libertés pour le plus grand nombre: celle d’entreprendre, celle de s’exprimer, celle d’obtenir justice, celle d’avoir accès aux droits les plus élémentaires : la nourriture, la santé, l’éducation, l’eau, la sécurité.
Il s’agit ni plus ni moins d’une forme de dictature.
Les élections sénatoriales arrangées en sont une des manifestations les plus flagrantes.
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