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Le Monde du Sud// Elsie news

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Haïti, les Caraïbes, l'Amérique Latine et le reste du monde. Histoire, politique, agriculture, arts et lettres.


Dimanche ayisyen/créole, Ce que tout le monde (et spécialement les locuteurs haïtiens) devrait savoir au sujet des langues créoles et du créole haïtien.(Sixième partie )

Publié par Elsie HAAS sur 6 Décembre 2009, 10:44am

Catégories : #H.SAINT-FORT chronique

                                          Morphologie et syntaxe du créole haïtien  

                                                        Par Hugues St. Fort

La morphologie est le domaine de la linguistique qui étudie la structure et le mode de création des mots dans une langue ainsi que les variations auxquelles ils doivent se soumettre dans une phrase. Dans toute langue, il y a des règles qui gouvernent la combinaison des mots. Cette partie de la morphologie est désignée sous le nom de « morphologie dérivationnelle ». Une autre partie de la morphologie s’appelle « morphologie inflectionnelle ». Elle explique les formes que peuvent prendre les verbes, les noms ou les adjectifs d’une langue. Dans les langues à flexion (latin par exemple), ces formes peuvent indiquer des relations grammaticales telles que le pluriel, le passé, la possession… Signalons que le kreyòl n’est pas une langue à flexion. 

La syntaxe étudie les règles qui déterminent la façon dont les mots se combinent entre eux pour former des phrases dans une langue. C’est le cœur de la langue. Nous comprenons le sens d’une phrase dans la mesure où nous comprenons les règles de sa syntaxe. Ces règles varient beaucoup d’une langue à une autre. Les locuteurs natifs d’une langue connaissent les règles de cette langue sans les avoir apprises formellement au sein d’une institution. Ce n’est que plus tard en fréquentant une institution scolaire et en apprenant l’étude formelle de la syntaxe qu’ils vont être conscients de ces règles.

Le Kreyòl possède bien sûr ses propres règles syntaxiques qui ne sont pas similaires à celles de ses langues sources, même si parfois ces règles peuvent coïncider. De même que le français n’a pas gardé les catégories de cas du latin (accusatif, génitif, nominatif…), la langue à partir de laquelle il a évolué, le kreyòl n’a pas gardé du français les catégories de genre et de nombre. Mais, comme en français, c’est l’ordre des mots qui assure le sens des phrases. Dans ces deux phrases, on peut tout de suite voir la différence :

a. Jak frape Andre
b. Andre frape Jak

Dans la première phrase, c’est Andre qui a reçu le coup. Mais dans la deuxième phrase, c’est Jak qui a reçu le coup. Pour interpréter une phrase, nous avons besoin de comprendre la relation qui existe entre les groupes de mots de cette phrase. L’analyse linguistique permet de regrouper ces phrases en unités plus petites. On appelle ces unités des syntagmes. Il existe des syntagmes nominaux et des syntagmes verbaux. En kreyòl, un syntagme nominal est composé d’un nom suivi d’un déterminant (article,…) contrairement au français où un syntagme nominal est composé d’un nom précédé d’un déterminant. Comparez ces deux phrases :

c. Les étudiants ont acheté de la bière.
d. Etidyan yo achte byè.

Le syntagme verbal est composé d’un verbe suivi ou non d’un syntagme nominal. Dans la phrase (d), le syntagme verbal est composé du verbe « achte » suivi du complément d’objet « byè » qui n’est pas accompagné ici d’un déterminant. Le syntagme verbal est en général plus complexe que le syntagme nominal. La grande majorité des phrases du kreyòl sont construites à partir de ces structures de base.

Le système verbal du kreyòl présente des différences considérables par rapport au système verbal du français bien que la majorité des éléments qui constituent ce système verbal dérivent directement du français. Pour exprimer les distinctions de temps, de l’aspect et du mode, TMA, le kreyòl se sert de particules placées devant la forme verbale qui reste invariable. Par exemple, la particule ap ou ape ou pe précédant une forme verbale ou un élément jouant le rôle d’un verbe exprime un fait en progression ou devant se produire dans un avenir très proche :

e. m ap rich demen (je vais être riche demain)
f.  tèt mwen ap fè m mal (j’ai mal à la tête)

La particule a ou va ou ava placée devant une forme verbale ou un élément jouant le rôle de verbe exprime un futur indéterminé.

g. si m kapab, m a vini demen. (je viendrai demain si c’est possible)

La particule te précédant une forme verbale ou un élément jouant le rôle d’un verbe exprime le passé.

h. mwen te jwe tenis ak yo yè swa. (j’ai joué au tennis avec eux hier soir).
i.  li te deja vann machin li an lontan anvan mwen te vann pa mwen an. (il avait déjà vendu sa voiture longtemps avant que je ne vende la mienne.

Dans la phrase (i), la particule te exprime l’idée d’une action passée précédant une autre également passée. Elle correspond à l’emploi du plus-que-parfait.

Ces particules de base peuvent se combiner entre elles pour exprimer des actions plus complexes. Te peut se combiner avec a pour indiquer le conditionnel, te peut aussi se combiner avec ap pour exprimer un passé progressif, c’est-à-dire l’imparfait. Le kreyòl dispose en plus de ces marques de temps plusieurs verbes modaux et verbes d’aspect. Les principaux sont : dwe, mèt, ka, vle, konn, vin, pran, fèk…
La syntaxe du kreyòl est évidemment beaucoup plus complexe que ce bref exposé que je viens de donner. On comprendra que dans le cadre de cette brève chronique je ne saurais livrer une étude plus large. A la fin de cette série, je donnerai une liste d’articles et de livres sur ce sujet qui sont susceptibles d’intéresser les lecteurs qui voudraient aller plus loin. La semaine prochaine, je parlerai du lexique du kreyòl.

Contactez Hugues St. Fort à : Hugo274@aol.com         

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