Un mois passé à Tours.
La pluie presque tous les jours.
Lecture tous les soirs.
Le marché les mercredi et samedi matin.
On y trouve des produits garantis sans pesticides.
Les pommes de terre ont un « vrai » goût, comme les ignames de Château.
Ma petite fille Azumi, un régal de tous les jours, jolie comme un cœur.
Quel âge as-tu Azumi ?
-moi j’ai "dezanédemi". Pourkoua-a ?
-Azumi mets tes chaussons.
-Pourkoua-a ?
-Azumi, on va sortir faire du vélo.
-Pourkoua-a?
3 ans ou l’âge des « pourkoua-a » à vous rendre fou.
Une fois qu’Azumi a épuisé sa réserve de pourquoi
du jour,
moi, ma réserve de patience.
-Azumi, c’est l’heure de dormir.
-Pourkoua-a ?
- Bon maintenant les pourquoi ça suffit. Grimpe dans ton lit tout de suite.
Après qu'elle se soit « résignée » à aller dormir
arrive mon moment de lire.
Mon frère, chirurgien et aussi passionné de littérature
me nourrit en livres à chacun de mes déplacements.
Le tome 1de 1Q84,
de Murakami m’a accompagnée en Haïti.
Le tome 2 en Guyane,
le 3 en Guadeloupe.
Toujours dans mon sac,
l’assurance d’une présence amie,
de quelle que qualité que puisse se révéler
l’environnement humain.
A Tours, j’ai relu la trilogie
de Jean Claude Izzo : Total Khéops, Choumo et Souléa.
Trois romans policiers sur Marseille, les flics, la mafia,
la jeunesse immigrée abandonnée à elle-même
dans les HLM sordides
et leur récupération
par les milieux islamistes et d'extrême droite,
bizarrement main dans la main
pour instrumentaliser le désespoir de ces jeunes largués.
Les faits racontés dans les romans d’Izzo
écrits à la fin des années 1990,
sont ceux qui se déroulent encore aujourd’hui.
Izzo fait partie de la bande de ces écrivains magiciens,
Tellement -comment dire?- collés à la vie
que leurs récits, mots, rythmes, images, sentiments, réflexions
traversent le temps, l’espace, les cultures.
Ils nous enrichissent tant qu’on leur doit un énorme merci.
A cette bande d’écrivains magiciens
dont les mots sont comme du sang qui coule dans les veines,
-à laquelle appartiennent un Jacques Stephen Alexis d’Haïti,
un Luis Sepulveda du Chili, parmi d’autres - ;
il y a Le Clézio avec son dernier bouquin.
Honnêtement, j’avoue que j’ai toujours eu du mal à rentrer
dans l’univers de Le Clézio.
-Pourkoua-a ?
Trop dificile à raconter.
Mon frère, toujours le même, le seul d’ailleurs,
a insisté :
- Oui, oui, je sais mais tu verras.
Effectivement, j ‘ai vu un minerai rare, un alliage de
beauté et cruauté, qui n ‘a rien à voir
avec le voyeurisme qu’étalent certains auteurs,
au prétexte de faire dans la description réaliste.
Ces « écrivains magiciens »,
chez lesquels rien n'est gratuit,
on les lit aussi avec le corps.
Le cœur se serre, les yeux sont embués,
Les jambes s’engourdissent,
On a soif, on a faim.
On se tord le ventre de rire.
Le souffle se raréfie parfois
ou au contraire s'accélère.
-Pourkoua-a ?
Eh bien, lisez " Histoire du Pied" de Le Clézio.
Et ça répondra, peut-être, au pourquoi.
N’est-ce pas, Azumi !
- Poukoua-a?
Oh la la, quand est-ce que cela va s'arrêter ?
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