En assistant à l'installation des sept membres du Conseil électoral provisoire d'exception, les ambassadeurs américain et français, la représentante du secrétaire général de l'Onu en Haïti et l'ambassadeur de l'Union européenne ont voulu apporter un soutien temporaire à Martelly afin d'encourager le Sénat à confirmer le choix de Me Néhémie Joseph au sein de l'organisme électoral
Incroyable !
Mais vrai.
Installation du CEP en présence des ambassadeurs US, de France, de L'Union européenne et de la représentante du secrétaire général de l'ONU.
Tout ce beau monde qui se déplace pour marquer leur présence dans une affaire qui concerne les institutions haïtiennes... Hum !
Imaginez aux USA ou en France des ambassadeurs étrangers allant s'impliquer dans les affaires internes de ces pays !
Ah, oui, me direz-vous, mais qui financent ces élections haïtiennes ?
Alors, n'est-ce pas normal que ceux qui mettent leurs thunes, leur fric, leur pognon, leur blé, leur kob, leur argent sur la table, s'assurent que celui-ci sera utilisé de la manière dont ils l'entendent ?
Est-ce que vous, simple quidam, vous iriez investir dans un projet avec le risque de voir votre investissement s'envoler en fumée ?
On n'est pas au casino, voyons !
Au fait, quel type de retour sur investissement veulent ces investisseurs de la communauté internationale ?
Ca c'est LA question.
Qui renvoie à d'autres.
Quels sont les projets de la communauté internationale pour Haïti ?
Comment ces gens-là considèrent ce pays, sa population, sa classe politique, sa société civile ?
Faudrait peut-être un jour faire un portrait de ces ambassadeurs des "pays amis", d'où ils viennent, leur carrière, leur sensibilité politique ?
Si ça se trouve, il pourrait y en avoir parmi eux des racistes, des proches de l'extrême droite. Qu'est-ce qu'on en sait ?
L'occupation du pays par les USA, ne s'était-elle pas faite en partie avec des troupes venues du sud profond et super raciste ?
La présence de ces dignitaires à l'installation du CEP comprenant 7 membres au lieu de 9, illustre une absence de respect pour la constitution haïtienne- disons carrément un mépris- et par là pour l'ensemble des Haïtiens toutes classes et tous secteurs confondus.
Le but de cette descente en force d'ambassadeurs occidentaux à l'installation du CEP, comme dit dans l'article, est d'influer sur les sénateurs présentés comme des obstacles et de montrer leur soutien au fulgurant tandem "Haïti is open to business" Lamothe/Martelly.
Certes. Mais pas que ça
Le plus important, qui n'a pas été relevé dans l'article, c'est la démonstration de force, la volonté de manifester clairement à l'ensemble de la nation qui sont les vrais acteurs.
Il s'agit d'une déclaration à l'ensemble de la population, non plus officieuse, mais officielle, qu'Haïti n'est pas un pays souverain.
Et aux autres nations de gauche - Venezuela, Brésil, Uruguay, Cuba, Argentine, Equateur etc- qui coopèrent avec Haïti, que ce pays est Leur chasse gardée.
Rappelez-vous que scénario- c'est nous les maîtres- avait été utilisé lors de l'affaire des vrais/faux passeports de Martelly.
Ils avaient laissé les Haïtiens, média, classe politique et société civile, se battre et se débattre autour de la question de la nationalité de Martelly pendant plusieurs mois. Et puis, un beau jour, quand l'affaire semblait prendre une tournure qui n'était point à leur goût, ils ont sonné la fin de la récréation.
Ont été convoqués tout le gratin, ambassadeurs, prélats religieux, hommes d'affaires, élites intellectuelles pour une grand-messe rose présidée par l'ex-ambassadeur des USA au cours de laquelle Martelly a exhibé une quantité de passeports haïtiens.
Martelly, l'ambassadeur des USA et un personnage sur la droite qui dit : moi aussi, j'aurai un jour mon propre ambassadeur.
Ainsi, cette histoire d'élections traîne depuis l'arrivée de Martelly à la présidence.
CEP provisoire, CEP permanent, respect de la constitution ou de l'amendement.
Martelly fait un coup de force et tente d'imposer un CEP avec à la présidence un pote à lui. Un duvaliériste notoire, comme d'hab.
Les sénateurs se rebiffent. Selon eux, comme écrit dans la constitution de 1987, les membres du CEP doivent être représentatifs de l'ensemble de la société. On devrait pouvoir y retrouver les secteurs du commerce, de l'agriculture, de la culture, des syndicats.
Le CEP de Martelly capote.
Impasse.
L'église catholique décide de jouer au médiateur avec son tout frais, tout neuf cardinal.
Rencontre à l'hôtel El Rancho entre l'exécutif et ses partis, l'assemblée nationale, des politiciens de tous bords.
L'opposition pour une part ne participe pas, pour l'autre part se retire après des désaccords. (OPL, mise à part, qui a adopté la position opportuniste "cul entre deux chaises", assimilée par les réacs haïtiens à de la sagesse.)
L'accord se voulant de dialogue national, prend le nom saugrenu d'accord d' El Rancho, le nom de l'hôtel. On n'est plus dans la comédie mais dans le western.
L'accord est signé.
Olé !
Les exactes mêmes discussions autour de la formation du CEP réapparaissent.
De qui sera-t-il formé ?
Le Sénat fait parvenir une lettre à Martelly pour lui présenter ses arguments.
Martelly rebelotte, refuse la discussion.
Je respecte l'accord d'El Rancho, dit-il. Et, sans crier gare, nomme son CEP, après avoir désigné pour son représentant, M. Canton, connu pour être l'avocat de Duvalier.
On est en famille.
L'avocat, sans surprise, est élu président par les 6 membres tous proches de l'exécutif.
Deux sont restés en dehors. Mais qu'à cela ne tienne !
Ne sommes-nous pas en Haïti ?
Cependant le Sénat renâcle. Il maintient ses exigences : un CEP crédible.
La communauté internationale, dont Martely est la voix, vient encore une fois à sa rescousse et se présente en force pour l'installation du CEP.
Fini les parlottes, semble t-elle dire. Les débats démocratiques n'ont pas leur place ici.
Les média, fidèles à leur rôle de caisse de résonance des intérêts de la France et des USA, se lancent dans une opération de dénigrement des sénateurs hostiles à la constitution de CEP telle que concoctée par l'exécutif.
Martelly, comme à son habitude en temps de crise, se fait la malle, s'en va en voyage. Il se rend à Cuba pour voir Raoul Castro, laissant à l'international le soin de régler cette affaire, qui les concerne plus que lui, comme elle l'entend.
Ce n'est pas lui qui voulait des élections, qu'on soit bien clair sur ce point, semble t-il dire. Alors, que ceux qui les exigent, se débrouillent.
Lui, faut qu'il aille pratiquer son espagnol à Cuba.
Maintenant, plus qu'Aristide, plus que Préval, il adore Cuba dont il ignorait presque l'existence avant d'être président.
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