Un Haïtien sans papiers court frénétiquement dans les escaliers d'un magasin de Saint-Domingue pour tenter d'échapper aux agents de l'immigration dominicaine. En vain, rattrapé, il est menotté et placé dans la "Camiona" qui l'expulsera bientôt vers son pays.
"S'il vous plait, non... Je suis venu travailler. Ma femme est enceinte", implore-t-il dans l'espoir d'une impossible clémence des policiers.
Surnommé la "Camiona", ce bus jaune comme ceux des écoliers américains, se remplit non pas de cris d'enfants mais d'angoisse et de peur au fur et à mesure que la journée avance.
Menottés avec des bandes en plastique, les clandestins arrêtés prennent place dans le véhicule qui devient vite une étuve.
Les fenêtres ont des barreaux et une paroi en fer sépare le chauffeur de ses passagers.
A la fin de la journée entre 80 et 100 immigrants clandestins se répartissent sur les sièges.
Ils viennent dans leur écrasante majorité de Haïti, pays parmi les plus pauvres du monde, avec qui la République dominicaine partage l'île d'Hispaniola.
Le pays, qui a connu la plus forte croissance d'Amérique latine entre 2010 et 2020, attire de nombreux immigrants.
L'opération policière, qui se répète presque quotidiennement, commence à 06H00 du matin avec une prière des agents de police.
Le convoi de cinq véhicules s'ébranle alors pour sillonner la capitale.
- "S'il vous plait" -
Uniforme et lunettes de soleil de pilote, la colonel Gicela Almonte prend le volant d'un pick-up. A ses côtés, l'inspecteur Jersson Paulino. A l'arrière sur le plateau, cinq hommes en jeans et tennis, avec un T-Shirt siglé de la DGM (Direction générale de la migration). Almonte est la seule qui a une arme.
"Regarde celui-là!", commente la colonel, en donnant un coup sur le toit. Aussitôt les cinq agents bondissent.
En apercevant les forces de l'ordre, certains jouent l'indifférence pour tenter de passer inaperçu, d'autres partent en courant, entraînant des poursuites qui se terminent souvent par l'arrestation du clandestin.
Si les policiers donnent du "S'il vous plait" en français aux sans-papiers, ceux-ci vivent la situation comme une profonde injustice.
"Ils ne font que mal traiter les Haïtiens. On ne peut pas traiter les gens ainsi. On a une couleur différente, mais c'est le même sang", se plaint Camy Belizaire, un des premiers passagers du jour de la Camiona. "S'il y avait du travail là-bas (Haïti), on ne mettrait pas les pieds ici. Ici, on aide. Construction, agriculture, c'est nous qui faisons tout".
Pendant les arrestations, des passant dominicains demandent aux agents comment ils peuvent dénoncer d'autres clandestins : "mon quartier en est rempli (de Haïtiens)", dit un homme à moto.
"Attrapez les tous! On doit être libre chez nous", lance une vendeuse.
Mais certains s'émeuvent. "C'est trop dur! Beaucoup travaillent honnêtement, il nous aident", dit Bianny Alcantara, en pleurs en assistant aux arrestations.
"Si vous êtes en situation illégale, je peux vous tirer de dessous de votre lit, la loi me le permet", a récemment clamé le chef de la DGM, Enrique Garcia.
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