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Rameau Normil, nouvel homme fort de la Police nationale.
Le Premier ministre Gary Conille a annoncé que son gouvernement travaillera à « garantir la sécurité nécessaire au progrès durable » et à rétablir l’État de droit en Haïti. Ce qui signifie que l’État compte bien reprendre le contrôle de la violence légitime aux terroristes. La sécurité semble être la préoccupation numéro un de la nouvelle équipe, qui choisit de ne pas attendre l’arrivée des forces étrangères pour prendre des mesures administratives et coercitives afin de combattre la criminalité.
l’État compte bien reprendre le contrôle de la violence légitime aux terroristes. La sécurité semble être la préoccupation numéro un de la nouvelle équipe, qui choisit de ne pas attendre l’arrivée des forces étrangères pour prendre des mesures administratives et coercitives afin de combattre la criminalité.
Par exemple, à la suite à l’assassinat des trois policiers par les bandits de Barbecue, le mercredi 12 juin, plusieurs unités de la police ont mené une opération d’envergure au bas Delmas afin de restaurer l’ordre dans ces quartiers sensibles entièrement contrôlés par les terroristes Viv ansanm. On ne connaît pas encore le bilan de cette intervention, ni si l’opération est toujours en cours.
Le 18 juin dernier, le directeur général du ministère de la Défense, Jean-Marc Berthier Antoine, sur ordre du ministre, Louis Marcelin, a adressé un courrier au lieutenant général des Forces armées d’Haïti (FAD’H), Jodel Lessage, lui demandant de mettre les forces armées d’Haïti en Condition D, dans l’attente des « instructions subséquentes » en vue de renforcer les capacités d’interventions de la PNH.
Le même jour, Conille et le coordonnateur du CPT ont assisté à la graduation de 455 policiers qui vont intégrer les forces spécialisées. Des jeunes des deux sexes très bien entraînés et très disciplinés, selon les autorités. On espère qu’ils continueront à être encadrés afin qu’ils puissent servir le pays. En tout cas, c’est un bon renfort quand on sait que beaucoup de policiers ont déserté la PNH pour aller aux États-Unis dans le cadre du programme Biden. Ce qui n’a pas manqué de diminuer ses capacités opérationnelles.
Une mesure qui n’est pas passée inaperçue : le mercredi 19 juin, Conille révoque Frantz Elbé et le remplace par Rameau Normil, qui occupait ce poste sous le gouvernement de Jovenel Moïse. Ce même Normil que l'ex-Premier ministre Joseph Jouthe avait publiquement qualifié d’« incompétent » avant de le évoquer, bien que Jouthe lui-même discutait ouvertement avec les chefs de gangs les plus notoires du pays, qu'il considérait comme ses « enfants ».
Critiques et moyens
Après la publication de la circulaire, Ashley Laraque, secrétaire de l’association des militaires, est monté au créneau. Il condamne le fait que le courrier ait été rendu public à son insu ; pour lui, il s’agissait de secret d’État qui n’aurait pas dû être révélé au grand public. Une absurdité ! Car si nous réclamons de la transparence, un simple courrier demandant à l’institution militaire de se mettre à la disposition de l’État ne saurait être une « trahison ». Selon lui, ce n’est pas non plus la prérogative du ministre d’entreprendre une telle démarche. Encore un détail sans grande importance, puisque le CPT et le PM n'ont soulevé aucune objection à cette demande.
Ashley Laraque admet toutefois que les forces armées doivent aussi participer à la lutte contre le grand banditisme, mais cela présuppose qu’elles disposent de suffisamment de moyens pour agir. Déplorant l’inefficacité des soldats lors de leurs interventions, il souhaite une modernisation des FAD’H pour protéger les frontières, les sites touristiques et les infrastructures stratégiques comme les ports et les aéroports, afin de limiter le trafic d’armes des criminels. On pourrait écouter son intervention dans l’émission Le Point sur la radio-télé Métropole avec Wendell Théodore pour les détails.
Ce dont cet ancien militaire a oublié de parler, c’est cette tendance à « privatiser » les services de sécurité nationale pour les besoins de certains gwo chabrak du pays. Un scandale ! Combien de fois n’a-t-on vu des personnes privées flanquées de policiers ou de militaires ! C’est anormal dans un État de droit car les forces de sécurité publique sont responsables de la sécurité de tous les citoyens et non de quelques potentats. Il est aussi inadmissible que les hauts fonctionnaires déplacent des contingents policiers, pour assurer le moindre de leurs déplacements.
Cependant, quant à la participation des forces étrangères, elle semble revenir à l’ordre du jour, même si l’on ne sait pas trop quand, ni si les Kényans et les autres troupes étrangères arriveront. Les Américains ont commencé depuis quelques semaines à installer du matériel diversifié à proximité de l’aéroport en attendant l’arrivée des troupes étrangères. Cela a permis la réouverture de l’aéroport, désormais sous le contrôle des policiers et militaires haïtiens. Cependant le conseiller Lesly Voltaire a par ailleurs critiqué l'ambassadeur américain en soulignant l’absence d’abris pour accueillir les futurs policiers étrangers, alors que ce même ambassadeur pressait récemment les autorités haïtiennes de former leur gouvernement.
Néanmoins, lundi 17 juin, Antony Blinken, lors d’une discussion à la Jamaïque sur la question du climat d’insécurité en Haïti, a annoncé le déblocage d’une aide de 133 millions de dollars dont 33 millions destinés à l’aide humanitaire. De son côté, le Premier canadien Justin Trudeau promet plus de 91 millions de dollars. D’autres pays, selon, Blinken, ont aussi proposé de participer aux efforts financiers ou logistiques, citant le Bénin, la France, l’Allemagne, la Jamaïque et l’Espagne.
Les autorités haïtiennes devraient prendre au mot Blinken lorsqu’il a déclaré que : « Seuls les Haïtiens peuvent décider de leur futur, personne d’autre. » Peut-être devrions-nous envisager une aide qui limiterait le nombre de policiers étrangers impliqués dans la lutte contre les gangs, en permettant aux Haïtiens de prendre le leadership des opérations, plutôt que de compter sur le Kenya, qui semble hésitant. Il serait judicieux de se concentrer sur des policiers étrangers qualifiés, capables d'utiliser les équipements et le matériel policier, pour accompagner les Haïtiens lors des opérations contre les gangs. Ces spécialistes pourraient également former les policiers haïtiens, assurant ainsi la continuité de la formation et du combat contre les criminels après leur départ.
Il est essentiel que nos dirigeants actuels et futurs démontrent l’intelligence et la volonté nécessaires pour reprendre en main la sécurité nationale au lieu de la confier systématiquement à la communauté internationale et au Département d’État américain qui poursuivent leurs propres intérêts en Haïti, comme nous l’a d’ailleurs souligné, Kenneth H. Merten.
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