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Le Monde du Sud// Elsie news

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Haïti, les Caraïbes, l'Amérique Latine et le reste du monde. Histoire, politique, agriculture, arts et lettres.


In Memoriam: Gérard Jean-Juste

Publié par Elsie HAAS sur 11 Juin 2009, 09:42am

Catégories : #AYITI ACTUALITES

 

On l'a assez répété, le régime Préval souffre d'un déficit patenté dans le domaine de la communication. Tout bien considéré, on ne l'a peut-être pas assez répété, car tout indique que notre Chef d'État est atteint de surdité autant que de mutisme.

 

Pis ! Dans son cas, on est en face d'une récidive, car le Président Préval n'en est pas à sa première prestation au timon de l'État. Au cours de son mandat, débuté dans l'ombre de son populaire prédécesseur et “faux jumeau”, il avait peu à peu gagné sa place dans le coeur de la majorité en imposant un style fait de simplicité et d'honnêteté. Cela lui avait valu d'entrer dans l'Histoire comme un des rares présidents de notre pays à avoir terminé son mandat sans aucune tentative de s'accrocher au pouvoir. Autre exploit: il a pu tranquillement se retirer dans la région natale de son père, Claude Préval, et d'y avoir entamé une oeuvre dont presque tous s'accordent à reconnaître l'intérêt et pour laquelle  l'agronome Claude avait multiplié les plaidoyers passionnés.

 

Ce premier tour de piste, et la retraite active qui l'a suivi, ont d'ailleurs autant pesé dans sa spectaculaire et improbable réélection le 7 février 2006 que son association à Jean Bertrand Aristide. Mais déjà ses plus chauds partisans, comme ses détracteurs les plus acharnés durant son premier mandat aussi bien que tout au cours de sa seconde et atypique campagne électorale, ont regretté pour les uns, stigmatisé pour les autres, son étonnant mutisme.

 

La communication est la pierre angulaire de tout pouvoir intelligent (soft power), car comme le proclamait déjà la Bible: “Au commencement était le Verbe” et puis encore: “L'homme ne vit pas seulement de pain...”. C'est en effet par la communication qu'un homme ou une femme d'État peut mobiliser, rallier, expliquer son programme et ses objectifs, exposer les difficultés, obstacles et embûches sur la voie tracée, dénoncer, voire mettre en garde et dissuader les inévitables conspirateurs.

 

Certes, il n'est pas donné à chacun d'entre nous d'être un Fignolé, un Mandela, un Fidel Castro, un Winston Churchill, un De Gaule ou plus près de nous Barack Obama. On naît tribun, on ne le devient que rarement. Mais au moment des grands défis, tous les peuples ont grand besoin de femmes et d'hommes de parole.

 

Le président Préval est, paradoxalement plutôt habile à la communication privée et chacun s'accorde à lui reconnaître cette qualité qui fait de lui un interlocuteur agréable jusque dans le désaccord. Là où il pèche, c'est dans le dialogue avec ce peuple qui s'est littéralement mouillé pour le faire entrer au Palais.

 

Je peux comprendre que René Préval n'ait ni goût ni talent pour la communication de masse, je suis moins à l'aise quand il se vante presque de ne pas écouter les médias et surtout devant la débilité de sa politique de communication. Car voilà le maître-mot de ce petit éditorial:”politique de communication”. Aucun des grands orateurs cités plus haut n'écrivait lui-même tous ses discours, mais ils partageaient tous le sentiment que la communication est au coeur de la politique.

 

Je comprends d'autant moins mon président, que l'un des êtres qu'il a le plus respecté et admiré, était un communicateur par excellence. J'ai nommé le très, l'immensément regretté, Jean Dominique.

 

Comble de malheur, l'aphasie présidentielle semble être contagieuse, car elle a affecté les uns après les autres les Premiers Ministres qui l'ont accompagné dans sa gestion de la Chose Publique.

 

Cette longue introduction, n'était en fait que prétexte à dénoncer la plus récente bourde de mon président: ce silence impardonnable devant la disparition de Gérard (Jerry) Jean-Juste.

 

Voilà un compatriote dont l'engagement auprès de son peuple ne s'est jamais démenti sur des décennies, dont on peut questionner les choix mais pas la sincérité, qui n'a jamais hésité à placer sa vie sur le tapis du combat pour la démocratie. Voilà un compatriote qui a été villipendé, et osons le dire martyrisé pour ses convictions, un modèle en somme; et qui s'en va sans la moindre “prise d'acte” de sa disparition, sans la moindre reconnaissance hors celle de ces milliers de délaissés que sa solidarité agissante avait élevés au rang de “compatriotes”.

 

Je m'autorise, au nom de l'amitié que je lui voue, à en appeler au Président René Préval, pour qu'il confère à Gérard Jean-Juste la haute décoration méritée par une vie toute entière placée sous le signe de l'amour pour son peuple.

 

 

Patrick Elie

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