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Le Monde du Sud// Elsie news

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Haïti, les Caraïbes, l'Amérique Latine et le reste du monde. Histoire, politique, agriculture, arts et lettres.


Eno Renoncourt s'adresse au linguiste Robert Berrouët-Oriol suite à ses interrogations sur le rôle des institutions internationales...

Publié par siel sur 5 Janvier 2024, 14:08pm

Catégories : #AYITI ACTUALITES, #E.Renoncourt chroniques

... dans l'Education nationale dans un article qui a pour titre :

Financement du système éducatif haïtien : les puissantes institutions internationales alimentent-elles la corruption en Haïti ?

Texte dont voici le début.

      Ces dernières années, les bonnes nouvelles n’ont pas cessé de pleuvoir d’abondance sur la toiture du ministère de l’Éducation nationale d’Haïti. À ce chapitre en effet, l’on a constaté que le Partenariat mondial pour l’éducation, la Banque mondiale, l’Union européenne, la Banque interaméricaine de développement et l’Agence française de développement continuent de se presser au chevet d’un système éducatif haïtien dont les tares et les maux sont diagnostiqués sous toutes les coutures depuis plusieurs décennies. En chœur ces puissantes institutions internationales trompettent, à coup de millions de dollars et d’euros, qu’elles œuvrent dans le but d’assurer, comme il est mentionné sur le site de la Banque mondiale, la « Promotion d’une éducation plus équitable, durable et plus sûre en Haïti ». Le champion toutes catégories de cet extraordinaire consensus international est assurément le Partenariat mondial pour l’éducation qui précise, sur son site, qu’il intervient « pour aider à faire avancer la réforme de l’éducation en Haïti » –ce qui laisse entendre aux incrédules et aux mécréants (dont nous sommes) qu’il y aurait actuellement en Haïti une présumée « réforme » éducative que les enseignants ne voient pourtant pas passer dans leurs écoles… D’ailleurs, dans leurs communiqués logés au sommet d’un exemplaire œcuménisme, les puissantes institutions internationales ne disent pas si elles oeuvrent à « faire avancer » la huitième ou la quinzième ou la trentième ou la cinquantième « réforme » de l’éducation en Haïti, ou si elles s’appliquent désormais à « réformer la réforme » du système éducatif haïtien… Qu’à cela ne tienne, la valse des millions de dollars et d’euros se poursuit, elle se danse nuit et jour dans les cabinets ministériels et dans l’antichambre des « experts » et des « consultants » nationaux et internationaux où trônent des diagnostics, des plans, des projets et des programmes qui se ressemblent d’une année à l’autre, la plupart du temps comme s’il s’agissait d’une prothèse miraculeuse aux innombrables vertus curatives. Et privé de boussole le Titanic haïtien –également connu sous l’appellation de ministère de l’Éducation nationale–, poursuit sa route sans savoir s’il se dirige vers la Rue des miracles ou vers la Rue des pas perdus…   

        La valse des millions de dollars et d’euros déversés depuis plusieurs décennies dans le système éducatif national a son vocabulaire, créole et français, qui témoigne de la permanence d’un phénomène qui figurera un jour prochain dans tous les manuels de sociologie politique et des sciences de l’éducation : l’« échec scolaire ». Échec non pas des élèves mais plutôt échec d’un système scolaire, qui enfante celui des élèves, échec de l’École haïtienne à tous les étages de l’édifice alors même que le système éducatif haïtien n’a pas cessé d’être amplement financé au fil des ans par les puissantes institutions internationales afin de colmater les mêmes failles, les mêmes maux pareillement diagnostiqués il y a dix, vingt, trente, quarante ans… Le ministère de l’Éducation nationale d’Haïti et les puissantes institutions internationales qualifiées de « partenaires » (ou de « partenaires techniques financiers », PTF) ont donc en commun le même vocabulaire, qui comprend de belles trouvailles lexicographiques : « réforme »/« refòm », « réformer »/« refòme », « réforme curriculaire »/« refòm kourikouloum », « gouvernance »/« gouvènans », « appui à la gouvernance », « éducation de qualité », « éducation équitable », « éducation durable », « appui budgétaire », « financement de l’éducation », etc.     

 

Cher Robert Berrouët -Oriol,
 
Merci pour le partage de cette thèse qui amplifie l'information que propose votre récente étude publiée sur le financement du système éducatif haïtien; laquelle questionne les liens entre les projets des agences internationales en Haïti et la corruption. J'applaudis vivement la médiatisation des publications sur cette thématique, car elles mettent en évidence les liens occultés qui verrouillent le pays sur son insignifiance, car reliant les projets de l'assistance internationale et la corruption endémique qui a plongé le pays dans cette gangstérisation. Il était temps que soit brisée cette grande omerta tissée entre les réseaux intellectuels, universitaires et socioprofessionnels haïtiens et les réseaux des agences internationales qui accourent au chevet d'Haïti.
 
Pour avoir travaillé, comme consultant dans ces projets entre 2006 et 2020, pour des agences comme le PNUD (projet état de droit), l'Union Européenne (Programme Statistique Minimum), la Banque Mondiale (projet ONPES, PASMISSI, SIMAST) le BIT (projet Inspection du Travail / MAST), je voudrais apporter un complément d'information pour dire que seuls les professionnels incompétents, insignifiants et au service de leurs intérêts personnels peuvent nier que les projets de l'assistance internationale (quels qu'ils soient) ont d'autres finalités qu'entretenir l'indigence du pays pour garantir leur performance. Mais les vrais mobiles de ces  projets sont si savamment dissimulés derrière des objectifs qui laissent croire à leur utilité, qu'il est assez difficile pour un incompétent, un insignifiant et un égocentré sur sa réussite personnelle de comprendre que la corruption est le moteur de l'assistance internationale.
 
En effet, ces projets sont en grande partie pilotés par de brillants universitaires (c'est le premier écran d'enfumage), même si le projet état de droit du PNUD a ete pendant longtemps dirigé par d'illustres incompétents , au point qu'en 2009, l'ACDI a dû suspendre sa contribution au financement de ce projet, tant le management était médiocre. Quand j'ai eu le privilège de rencontrer le deuxième personnage du bureau du PNUD en Haïti (Anne Marie Cluckers) et que je lui ai fait part de l'insignifiance de l'expertise que l'assistance internationale envoie en Haïti, notamment au projet état de droit, avec un cynisme à peine dissimulé, elle m'a laissé comprendre que l'expertise de l'assistance internationale est dimensionnée sur la compétence technique et humaine du leadership du pays bénéficiaire. Cela dit tout.
 
C'est depuis lors que je me suis juré de démasquer et de cartographier l'insignifiance des élites académiques haïtiennes. Ce sont elles qui sont les premiers bénéficiaires de la corruption, c'est pourquoi elles se constituent en réseau d'entre soi indigent, incapable de supporter la pensée critique. Un entre soi porté par trois quantificateurs d'indigence:  la soumission, à la limite de la servitude volontaire, l'opportunisme (malsain) et l'insignifiance au service des intérêts personnels.
 
 En outre, ces projets surfent sur une réalité immonde et invariante qui leur donne une certaine légitimité qu'elle manipule habilement à travers des cadres logiques et des objectifs qui mettent en avant des concepts éloquents : bonne gouvernance, gestion axée sur les résultats, résilience. Mais au fond, ce ne sont que des boites noires qui donnent une impression de changement pour mieux entretenir l'invariance.  Je vous donne deux exemples concrets:
 
1-) En 2002, le prestigieux VERA institute a dépêché une mission d'expert en Haïti pour trouver des solutions durables au problème épineux de la détention préventive. 
 
Le document de mission de VERA en 2002 commençait en ces termes : Page 3
 
Il y a présentement deux fois plus de détenus dans des prisons de Haïti qu'en 1995 dont environ 80% attendent d'être jugés. Avec l'appui de la Open Society Institute et le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), Vera a rassemblé une équipe de chercheurs afin de revoir le problème souvent étudié mais jamais résolu de la détention préventive prolongée et les problèmes des mauvaises conditions des prisons.
 
Ce rapport passe en revue les initiatives précédentes, identifie des causes des problèmes persistants, et recommande des réformes progressives, immédiates et à long-terme, pour le Ministère de la Justice et les organismes concernés de l'État.
 
 
En 2008, le PNUD a recruté une nouvelle mission d'expertise pour évaluer la stratégie de la réforme de la justice en Haïti. A la page 1, dans son résumé analytique, l'expert écrit ceci :
 

Depuis plus de 20 ans, des efforts et des tentatives ont été entreprises pour réaliser une réforme de la justice en Haïti et pour répondre aux besoins et aspirations de la population, faire justice aux victimes et mettre un terme à l’impunité.

Plusieurs diagnostics  et analyses ont été réalisés, afin d’identifier les raisons des blocages et trouver des solutions pour y pallier, sans aboutir à l’amélioration souhaitée.

 
22 ans plus tard, ce problème n'a jamais été résolu, car c'est un vrai business qui assure la performance de l'assistance internationale et de ceux qui profitent de leurs accointances avec ces milieux.  Quiconque de compétent, se montrant critique par rapport à ces projets, sera black listé et votre profil marqué en lettres rouges dans le ''roster'' de ces agences.  D'ailleurs celui qui a dirigé la mission d'expertise de VERA en 2002 est revenu comme coordonnateur du projet état de droit du PNUD en 2015 pour résoudre le même problème. 
 
Pensez-vous qu'il aurait eu cette promotion en 2015 si sa mission a ete couronnée de succès en 2002 ?
 
 
 
2-) En 2009, le BIT a conduit un projet qui devait entre autres doter le Ministère des Affaires Sociales d'un édifice décent,
 
 
Page 29 rapport du BIT Juillet 2009 : Mémorandum technique sur le renforcement du MAST
 
Actions Urgentes pour le MAST : Créer un environnement de travail décent au MAS/T
L’état de l’immeuble du MAS/T et des locaux de ses entités déconcentrées est tel qu’il est urgent de trouver une solution à cette question, en identifiant des locaux pouvant abriter certains services centraux du ministère, en réhabilitant les bureaux régionaux et enfin en les équipant du minimum. Il n’est pas inutile d’insister sur l’urgence de la mise en conformité des locaux du MAS/T avec les normes de sécurité et de convivialité.
 
Or à ce jour, le MAST est toujours logé dans un immonde édifice infesté de rats à l'Avenue Charles Summer, encore pire que là où il se trouvait à la rue de l'enterrement.
 
 
 Peut-on encore douter que ces projets ne sont que des boites noires qui entretiennent la processus de l'errance de nos institutions ?
 
Voici comment j'ai modélisé l'arnaque que représente le management de l'assistance internationale qui pilote le renforcement institutionnel haïtien.
C'est ce processus que j'appelle la performance défaillante dont le moteur d'enfumage est le paradoxe des boites noires. Car toutes les institutions haïtiennes prises en charge depuis 1994 par l'assistance internationale se trouvent dans le même état d'insignifiance et parfois même pire (la justice et l'éducation sont les exemples les plus criants) qu'elles étaient avant. Et c'est justement l'échec de ces deux piliers , justice et éducation , qui expliquent l'état d'impuissance déshumanisante du pays 220 ans après son indépendance. Difficile de ne pas trouver une institution haïtienne, même parmi celles prises en charge par l'assistance internationale, qui ne se présente pas dans cette modélisation.
 
 
Juste pour vous montrer comment se structure le réseau de corruption....et comme je ne cesse de le dire, la corruption des hommes politiques n'est que l'iceberg de l'écosystème de la corruption qui existe en Haïti.
 
 

 


 
 
 
 
Allez, bonne continuité....
 
 
Erno Renoncourt
Citoyen Haïtien Indigné, Insoumis, Insolent

 

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