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Le Monde du Sud// Elsie news

Le Monde du Sud// Elsie news

Haïti, les Caraïbes, l'Amérique Latine et le reste du monde. Histoire, politique, agriculture, arts et lettres.


lenouvelliste.com, Au nom de la jeune génération par Max Déjean

Publié par siel sur 11 Mars 2011, 10:54am

Catégories : #AYITI ACTUALITES

Haïti: Le déferlement de vagues provoqué par les derniers événements interpelle la conscience de tout éducateur, puisque de l'avis général, la jeunesse souffre d'un déficit de mémoire, reprochable à ses aînés.
C'est tout à fait vrai.
On a cependant oublié de souligner que ce devoir de mémoire exige parallèlement un devoir d'informations et d'informations actuelles. Car tout ramener à la période 57-86 c'est éviter d'admettre que la suivante est nôtre, que nous n'avons fait que réinventer ce régime d'horreur sous une forme plus pernicieuse.
II est venu le temps de se parler, non par signe, comme l'a si joliment dit le poète, mais de tout dire, tout se dire, nos mensonges réels comme nos fausses vérités.


D'abord, nos rapports avec la jeunesse.
Ceux qui naquirent à l'aube des années 80 ont l'air de petits vieux avec le regard triste et les mots amers des gens qui ont découvert trop tôt la misère humaine. Ils ont traversé l'enfance sans en connaitre les joies.
Que leur avons-nous offert? Que leur avons-nous appris?
A vendre leur âme pour un plat de lentilles, rappelez-vous notre ridicule guéguerre Lavalas-GNB.
A idolâtrer les générations spontanées de l'opulence, via la drogue, la corruption et la prostitution, vous avez dit big boss?
A banaliser la violence, voir l'enquête se poursuit.
Ils ont été témoins de l'extrême arrogance des incompétents et des médiocres en posture de donneurs de leçons.
La bêtise à indice himalayen !


Comment comprendre par exemple qu'on leur ait publiquement présenté la tuerie de Cazale, comme une histoire de conflit entre deux localités, alors qu'il s'agissait du sauvage assassinat de jeunes opposants par les sbires du pouvoir macoute ?
Autant occulter qu'à cette époque, la seule détention d'un ouvrage marxiste équivalait à un passeport pour l'enfer de Fort Dimanche!
A ce stade se pose une terrible interrogation : n'aurions-nous pas volontairement organisé la désarticulation de la jeunesse haïtienne? Et si oui, à quelle fin ?

 

L'INTERNATIONAL
Ici, l'international s'appelle Occident.
Ici, l'Occident est maitre du jeu. Il distribue les cartes et désigne les gagnants.
Un exemple entre mille: c'est lui qui décide de l'arrivée d'un ancien chef d'état, comme de l'éventuel retour d'un autre. Dans les deux cas, notre destin ne nous appartient pas. Seules nous restent nos habituelles rodomontades, dérisoires et insipides.
Des démagogues de tout bord parleront de président blanc, alors que tout leur capital politique loge sans vergogne dans les officines des proconsuls.
Inutiles d'insister sur les coups d'état, coups bas, trahisons ... qui chevauchent notre itinéraire, l'occident mène le bal.


2011, plus d'une décennie depuis que le troisième millénaire aura cogné à la porte, et encore et toujours, l'occident finance notre budget national dans ses grandes largeurs.
2011, et persiste sur le petit écran, l'image désespérante de nos autorité remerciant un diplomate, pour un quelconque projet, un pont, une école, une flopée de motos ...
2011, et encore et toujours, l'argent de l'occident accouplé à celui de nos taxes parera une kyrielle d'honorables députés et sénateurs.
Honorables dites-vous? Budgétivores, rien d'autre. Tiens ! Pourquoi tu rigoles missié blanc? Ah oui!

 

J'allais oublier : les élections c'est l'occident qui casque et quand cela se gâte nous montons sur nos grands chevaux pour claironner bien fort « mascarade électorale» Comme quoi la brillante liste de nos dix neuf candidats à la présidence, ce n'était pas de la mascarade.
L'indignation impulsée par l'infamie de la Jamaïque est plus que légitime, d'autant plus qu'il concerne des jeunes éloignés du cocon de leur centre de formation et humiliés en terre étrangère, mais attention: dans l'émiettement étatique de la Caraïbe, nous sommes cordialement détestés.
Parce que les autres nous voient comme leur propre image, à travers le prisme d'un miroir déformant.
Parce que nous faisons peur.
Parce que nous sommes perçus comme sales et malsains.
Nos compatriotes sont régulièrement maltraités par toutes les polices de la zone
Et pourtant, 2011, ni hier ni aujourd'hui pas encore un Bureau des affaires haitiano-dominicaines!

 

Le seul à nous offrir un fraternel abrazo, se trouve être celui que nous avons honteusement trahi à la
Conférence de Punta del Este: Cuba.
Mais à Cuba, il y eut le Che! A Cuba, il y a Fidel.
    Et à ces deux-là on peut tout reprocher sauf l'amour qu'ils ont conjugué pour leur pays d'adoption et d'origine, à tous les temps et par tout temps.
Qu'en dites-vous messieurs les nationalistes?
Quant à la Jamaïque, elle n'en finira pas de s'avilir, jusqu'à se faire rattraper par le colonialisme dont elle ne s'est jamais débarrassée.

 

Et enfin Haïti !
La saga de notre portion d'île pourrait s'intituler: chronique d'un pays non aimé. Un peu partout sur la planète fleurissent des poches de sous-humanité : favelas du Brésil, intouchables de l'Inde, ghettos des U.S.A ... mais nous sommes l'un des rares pays, sinon le seul, à avoir planifié, le mot n'est pas trop fort, la marginalisation de plus de 85% d'une population. Notre mépris envers les démunis, nos préjugés, nos clivages sociaux ont transformé ce coin de terre en un microcosme de tous les apartheids.
Éducation? Santé? Niet !

 

J'ai souvenance d'un panneau publicitaire flanqué de fesses négroïdes, soulignés par un mini slip qui émut à en fendre l'âme, le ministère à la Condition féminine et les organisations des droits de la femme. Ce furent tout de suite les déclarations tonitruantes: instrumentalisation du corps féminin, machisme et tout le tremblement.
Or dans le même temps, des petits malins proposaient la télé, à grand renfort de spots « des produits rendant la peau plus claire» Une multitude de « grimelles market» envahit le décor.
Seuls le ministère et les organisations concernés, furent semble-t-il atteints de cécité sélective!
De pâles copies des institutions du Nord voudraient donner le change: protection du citoyen, droits de l'homme, société civile...
Ça parle de mondialisation en vidant le mot de son contenu réel: la colonisation du Sud.
Ça parle de dialogue, de réconciliation nationale! Entre qui ou avec qui?
Quelle réconciliation quand des millions de nos compatriotes, coupables d'un péché originel, celui d'être mal nés, ne connaitront au terme de leur cycle de vie, que le tout au rabais: école, soins médicaux, habitat, alimentation ...
Quand tout se joue à travers des clans, des petits clans, de tout petits, petits clans où le dialogue commence par je et finit par moi.
Où les sottises du genre «devan devan net» (aucune intention allusive au discours de contexte électoral de Mme Mirlande Manigat) «n'ap byen menen» «pito'n lèd nou la» occupent le haut du pavé.
Tenez: ça me fait penser à une équipe aguerrie de professionnels du foot, rencontrant des gueux, n'ayant pour expérience que leurs pieds nus, leur «boul len» et la rocaille pour terrain et leur déclarant sans ambages que la balle est ronde pour tous, qu'on part à chances égales...

 

Dis-moi camarade: naïveté ou cynisme, cette réconciliation?
Si elle invite à effacer les haines, à roder les angles, elle exige qu'on torde le cou à l'impunité, toutes les impunités.
Car sais-tu, tendre le joue gauche après le coup reçu à droite, c'est l'évangile, l'église, la résignation ... pas le pardon qui nous préoccupe.
Malgré le respect que m'inspirent certains de nos intellos, je comprends mal leur rejet du « Nous sommes tous coupables». Quand on évolue dans la modernité du 21e siècle et qu'on s'indiffère des conditions moyenâgeuses d'existence d'une immense majorité, il devient trop facile de jouer les Ponce Pilate.
Nous y avons, à un niveau ou à un autre, notre part de culpabilité surtout quand on se déclare société civile.
A ces devoirs de mémoire et d'informations doit s'ajouter celui de pardon.
Nous faire pardonner, nous soi-disant élite, notre couardise face à l'international, notre cupidité, dos courbé pour ramasser les miettes des O.N.G..
Notre peur à affronter le silence et la solitude de notre conscience ou de ce qu'il en reste, quand elle nous interroge et nous rappelle que tous les alcools de la terre ne sauraient gommer la néantisation d'un peuple.

 

Et en attendant, Quisqueya poursuit son odyssée, navire en perdition, sans boussole, ni marin, ni capitaine pour infléchir ses mortelles dérives.
Et attendant, à travers l'haïticide, nous élargissons la voie royale menant vers un goudougoudou d'un autre type, car des bourgeons explosent quand on les prive trop longtemps de leur part de soleil!

 

Vois-tu camarade, je n'aimerais pas revivre ce moment où en pleine salle de classe, un gosse me demanda: «Dis-moi Monsieur, c'est quoi un parc d'attraction? »
Toute la frustration du monde éclaboussait son regard.

     
      Max Déjean
La Jachère

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