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Le Monde du Sud// Elsie news

Le Monde du Sud// Elsie news

Haïti, les Caraïbes, l'Amérique Latine et le reste du monde. Histoire, politique, agriculture, arts et lettres.


Lettre au Compère Jacques Stephen Alexis

Publié par siel sur 25 Septembre 2011, 09:48am

Catégories : #CULTURE

Haïti: Frère Jacques , je t'écris de nulle part

D'un tambour kata oublié dans un péristyle à Fonds -Parisien

D'un pays qui n'existe plus à force de mal exister.

Aujourd'hui, ta terre d'Haïti Toma

Quisqueya aux seins mûrs

N'est plus étincelante de merveilles

Elle est la rouillée

Entre des parenthèses de sang

Et les oeillades d'Apocalypse.

Depuis ton départ sa marche s'est arrêtée

Comme la voix du vieux vent caraïbe

Fatiguée de conter nos légendes aux étoiles

Sans les arbres musiciens

abattus, réduits au silence pour raison d'Etat

Papa Jacques, depuis 50 ans

Rien n'a vraiment changé

seuls les mots, les formats et les formes

crois-moi, les blancs ne débarquent plus ,ils se font inviter

et envahissent nos marchés, nos hounforts ,

nos cimetières, nos bidonvilles, nos salons et nos cuisines

il y a encore un pays en dehors

coupé de ses papas loas, ses papas bois d'Orme

un pays enseveli sous le manteau de l'aide humanitaire

un pays à l'encan ouvert et vendu sans papier

aux sans-papiers Yankees onusiens.

En passant, depuis la chute du Mur

Il y a le devoir d'ingérence des grands

Dans les affaires des petits pays rebelles à leurs dictées

Et la CPI pour juger les non-alignés

Mon Compère

L'espace d'un cillement

nous avons durci la glaise forgeuse d'une autre nation

l'espace d'un ruban de silence

dans notre cupidité nous avons éteint et enterré

les folies de Caucho et de Nina

les délires d'Hilarion et de Désirée

les revers muets de Gonaïbo et de Harmonise

Général sans armées ni troupes

Avec l'arme de la plume acerbe et rutilante

Qui viendra crier justice pour ton kidnapping

Qui viendra te confectionner une sépulture d'allégorie

Et dans quelle cathédrale en ruines chantera-t-on tes obsèques

Frère compère général, Companero

Les camarades sont dispersés

Ils ont changé de plume, de couleur et de camp.

Nous ne savons plus dans nos yeux collectionner

Les papillons et les soleils de la Saint Jean.

A force de perdre nos mémoires nous avons perdu la mémoire.

Nous ne devons pas oublier

Même si nous nous enfonçons au plus épais de la nuit.

Le soleil délire à force d'attendre là-bas dans le devant-jour

Juste sur la frontière du rêve.

 

Texte  non signé lu dans le journal haïtien Le Nouvelliste

que je reproduis ici, afin que nous n'oublions pas que cette année

marque le 50ème anniverssaire de l'assassinat par des macouto/militaro/duvaliéristes

de notre brillant, généreux et courageux, médecin, militant et écrivain, Jacques Stephen Alexis.

 

A ce sujet, voici une petite anecdote qui illustre

bien la riche personnalité d'Alexis.

Elle m'a été rapportée par le poète et écrivain Gérard Chenet.

C'était sous Lescot, au moment de la révolution de 1946.

Les leaders de ce mouvement revendicatif

se trouvaient en prison dans des cellules séparées.

Ils n'avaient, on s'en doute, vu les conditions de vie

dans les prisons haïtiennes, guère le moral.

Pour les aider à tenir le coup, Jacques Stephen Alexis, s'est appliqué de sa cellulle à leur faire un séminaire

sur la notion de relativité d'Einstein.

D'après Chenet, c'était la première fois qu'il entendait une explication aussi limpide.


Tel était Jacques Stephen Alexis, qui dans les moments les plus difficiles

avait recours à l'intelligence pour combattre l'obscurantisme.


Et ce don de l'esprit ne lui a jamais été pardonné.

La bête immonde, comme on dit, ne tolérait pas la lumière.

Et ça continue, son ventre étant encore fécond, comme dit Brecht.

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