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Le Monde du Sud// Elsie news

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Haïti, les Caraïbes, l'Amérique Latine et le reste du monde. Histoire, politique, agriculture, arts et lettres.


L’ultime retour des barbares. Par Fethi GHARBI

Publié par siel sur 9 Août 2014, 09:51am

Catégories : #INTERNATIONAL

Lors de la conquête fiévreuse du nouveau monde, les pays européens se livrèrent avec acharnement à la mise en valeur des territoires conquis. L’exigence d’une main d’œuvre abondante et à bon marché conduisit vers la solution la plus simple et la plus rentable : la traite des noirs. C’est donc la mise en place d’un système économique lucratif qui est à la base de la métamorphose d’une catégorie d’hommes en "nègres". Cette déshumanisation d’une partie de l’humanité sera avalisée après coup par l’Eglise romaine apostolique, l’église Anglicane, puis par l’ensemble des mouvements protestants. Assimilés aux descendants de Cham, les noirs héritèrent de la malédiction qui le poursuivait. Selon le récit biblique, Cham père de Canaan, fils de Noé fut condamné à être « pour ses frères, le dernier des esclaves » pour avoir vu tout nu son propre père. La malédiction de Cham devint alors l’argument fondamental de tous les esclavagistes européens qui n’hésiteront pas à se soumettre à la volonté de dieu.

C’est seulement au XIXème siècle que l’argumentaire religieux s’essouffla et céda la place à des justifications de type rationaliste. Une pléiade de philosophes et de penseurs se mettait à l’œuvre pour démontrer la supériorité biologique de l’homme blanc. La déshumanisation s’étendra cette fois-ci à l’ensemble des races non blanches. La vague abolitionniste à la seconde moitié du XIXème siècle s’explique non par une quelconque élévation morale mais par l’apparition d’une nouvelle forme, plus élaborée et plus systématique, de l’exploitation de l’homme par l’homme : le colonialisme. En effet, les deux tiers de la planète furent soumis en un tour de main à l’impérialisme européen et des centaines de millions d’humains se retrouvèrent asservis et déshumanisés au nom d’une prétendue hiérarchie raciale. Le fameux code noir, tombé en désuétude, fut promptement remplacé par un texte tout aussi dégradant : le code de l’indigénat (3). Ainsi La brèche ouverte par l’ancien régime se transforma avec ce nouveau mode d’exploitation en béance divisant irrémédiablement l’humanité en deux entités irréconciliables. Ce racisme colonial qui dans un élan faussement universaliste voyait dans le colonialisme une prétendue entreprise civilisatrice des races « inférieures », emportait l’adhésion de tous les courants politiques de l’époque. Quelqu’un comme Friedrich Engels trouvait que « ... la conquête de l’Algérie était un fait important et heureux pour le progrès de la civilisation... » (4). Le pas sera toutefois vite franchi vers un racisme plus radical, le racisme différentialiste qui pose les races non blanches comme biologiquement impures, et porteuses de tares transmissibles. Plusieurs auteurs du XIXe siècle, tels que Joseph Arthur Gobineau (1816-1882), George Vacher de Lapouge (1854-1936) et Karl Von Chamberlain (1855-1927), considéraient toute forme de métissage des races comme une atteinte à la pureté des races supérieures. Dans son Essai sur l’inégalité des races humaines, Gobineau soutenait que l’hybridation des races entrainait inéluctablement la dégénérescence de la race aryenne, l’affaiblissement de ses qualités et ultimement, sa dissolution. Le darwinisme social viendra renforcer ce courant de pensée. Pour le philosophe et sociologue Herbert Spencer (1820-1903), le mécanisme de la sélection naturelle décrit par Darwin serait totalement applicable au corps social. La lutte pour la vie entre les êtres humains est par conséquent l’état naturel des relations sociales. Les conflits deviennent ainsi la source fondamentale du progrès et de l’amélioration de l’espèce. La concurrence entre les êtres ou groupes humains ne doit aucunement être entravée par une quelconque mesure de protection ou d’assistance. Seule la lutte acharnée pour l’existence est en mesure de favoriser la survie des "plus aptes" et l’élimination des "moins aptes". Le physiologiste britannique Francis Galton (1822-1911), ira encore plus loin. Pour lui, l’Européen moderne est l’être humain qui possède les meilleures capacités génétiques. Pour les préserver et éviter que le patrimoine génétique humain ne dépérisse, les porteurs de « mauvais » gènes devraient être stérilisés ou empêchés de se reproduire.

Il n’en fallut pas plus pour qu’une bonne partie du monde occidental se trouvât secouée par une folle vague eugéniste. Ce mouvement connut un essor particulièrement rapide aux États-Unis. Dans les premières années du XXème siècle, au nom de lois diverses prétextant entre autres le « déclin de l’intelligence américaine », des dizaines de milliers de citoyens américains asiatiques, noirs, européens du Sud et de l’Est furent stérilisés malgré eux. Le phénomène s’étendra ensuite au Canada, aux pays scandinaves, à la Grande Bretagne, en Suisse et en Allemagne.

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