Un total de 850 pages bien concotées, écrites en un mélange de 9 langues, provenant des pays de la Caraïbe et de l’Amérique du Sud. Ont été retenus 10 textes d’écrivains haïtiens. Ils sont en bonne compagnie. Citons entre autres la présence du Guadeloupéen Ernest Pépin, de la Chilienne Isabel Allende et du Portugais prix Nobel de littérature 1998, José Saramango. Les écrivains haïtiens se retrouvent 7 sous la rubrique « poésie » et 3 sous la rubrique « contes ». Les voici par ordre alphabétique :
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7 Poèmes sur l’enfance.
Une Chanson par Franz Benjamin p. 678-9
Le père et l’enfant (Pitit papa’l) par Georges Castera p. 704-5
Tchou-tchou par Louis Philippe Dalembert p. 721-2 (Je le salue au passage pour le prix Cas de las Americas 2008)
A tous les enfants qui souffrent par Gary Klang p 750-1
Réinventer l’enfance par Jean-Robert Léonidas p 754-6
Le petit garçon qui ne voyait qu’une chose à la fois. Par Stéphane Martelly p. 763-4
Dors mon enfant, dors. ( extrait de Mon Pays que voici) Par Anthony Phelps p. 802-3
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3 Contes :
La naïve délinquance enfantine. Par Frankétienne p. 339-41
Les deux enfants du dieu. Par Roland Paret p. 491-2
La mort abondante. Par Emmelie Prophète p. 503-5
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Réinventer l’enfance. ( Par Jean-Robert Léonidas)
( extrait de las Palabras pueden. P. 754-6)
Où les grands jouent aux cartes et s’adonnent à des riens.
Je hais les uniformes, les formes uniques où les têtes se nivellent ;
Je hais les terres plates des villes où monts et vallons se confondent,
Les faces sans relief où l’humeur est égale et l’affect sans nuance.
Je déteste les mondes où, faibles, sans défense,
Les marmots sont pareils à des vieux en enfance,
Aux piliers fragiles d’une terre en démence.
J’ai l’ âge des chiens, tous les ans j’ai dix ans.
Aujourd’hui j’en ai six et cela fait soixante.
Plus vite que mes os je grandis, plus vite que mon âme.
Pour moi, jamais une caresse, jamais un mot aimable.
Je préfère être un chat plutôt qu’être un enfant. On m’aimerait davantage.
Sur rue point de pignon, pour moi nul baptistaire.
Je n’ai point de pays, je suis une frontière.
J’ai un nom africain et qui sonne haïtien ; je parle dominicain
je sais dire en trois langues des choses qui déplaisent.
Dans notre case étroite point de petit écran.
Pourtant au grand jour passent des films porno.
Et dans mes sommeils mon esprit déraille
ne sachant plus si j’en suis spectateur ou acteur.
Je hais, oui je hais jusqu’à ma mère
Puisqu’elle est partie sans me dire à plus tard.
A quoi servent les guerres, et pour qui et pour quoi ?
Soldat, veux tu te battre pour ma soeur, pour moi ?
A quoi bon la culture?
Fermier, j’ai faim, veux-tu planter pour moi ?
Veux-tu cueillir sur l’arbre de la vie
Un bouquet d’oxygène, un rameau de bonheur
Pour un fils de personne qui quémande de l’air?
On te dit spécialiste en tout, en droits de l’homme.
Voudrais-tu, cher monsieur, prendre ma défense
Et me me servir de père, adopter un petit mendiant sans-maman ?
Je ne fais qu’enculer les mouches qui s’abreuvent de ma morve,
Qui font la ribambelle dans le carnaval de ma peau brune
Et de mes cheveux roux, ces couleurs que je porte comme un fanion
Comme le drapeau de la victoire des autres sur ma cause perdante.
Je n’ai point le courage de me moucher. Lave-moi, s’il te plaît, lave-moi de ma plaie.
( Par Jean-Robert Léonidas p.754-6)
Jean-Robert Léonidas, Endocrinologue et Professeur Associé de Médecine aux Etats-Unis, entretient depuis 1992 des relations houleuses avec son épouse la médecine et cohabite passionnément avec sa maîtresse, la littérature. A son actif : plusieurs articles d’ordre littéraire, deux essais, un roman et un recueil de poèmes. Il continue d’écrire ardemment.
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