La mise en garde habituelle voulant que tout accusé doive bénéficier de la présomption d’innocence s’impose, même devant des accusations aussi graves que complot, fraude envers le gouvernement, abus de confiance et actes de corruption. Néanmoins, de telles accusations jettent l'opprobre sur Montréal et tout le Québec. Elles exigent de la part de Michael Applebaum des explications qui ne peuvent se limiter à ce banal "je n’ai rien à me reprocher" qu’il a opposé jusqu’ici aux soupçons dont les médias ont fait état à son sujet en début d’année.
Un véritable "cancer social"
Il y a dans l’arrestation du maire Applebaum quelque chose de profondément débilitant. D’abord, parce qu’il s’agit du premier magistrat de la plus grande ville du Québec qui, au titre de président de la Communauté métropolitaine de Montréal, est le représentant de près de 3,5 millions de Québécois. Il est le personnage politique le plus important après le Premier ministre du Québec. Le titulaire de cette fonction se doit d’avoir une conduite exemplaire.
Certes, il n’a commis aucune faute dans son rôle de maire, les gestes qui lui sont reprochés ont été commis alors qu’il était maire de son arrondissement. Mais il a pu s’élever à ce poste où, ô triste ironie, il se faisait le champion de la probité, réclamant aux entreprises qui ont fraudé la Ville de Montréal ces dernières décennies de la rembourser. Il voulait restaurer l’honneur de Montréal. Il lui apporte la honte.
Bonjour le cynisme. Après la mise en cause des maires des petites municipalités, du maire Vaillancourt à Laval [accusé d'avoir dirigé un gang criminel], de l’ancien président du comité exécutif de Montréal, Frank Zampino [accusé de fraude, complot et abus de confiance], où donc s’arrêtera ce scénario des horreurs politiques ? Qui sera la prochaine personnalité à être accusée de fraude et de corruption ? Qui donc voudra croire que l’on s’engage dans le service public pour servir ses concitoyens alors que c’est pour se servir que tant de politiciens l’ont fait ? "C’est comme ça que ça marche depuis les années 1960", nous répètent les témoins entendus par la commission Charbonneau [qui enquête depuis octobre 2011 sur l'octroi et la gestion des contrats publics dans le secteur de la construction au Québec] pour justifier la perte de tous repères moraux dont ils sont atteints. Un véritable cancer social.